mardi 6 décembre 2011

l'exposition Munch à Beaubourg

Cet article prend ses sources dans les commentaires de l'exposition mais aussi dans la revue de l'exposition et dans le "connaissance des arts" Hors Série N° 503


Beaubourg

Nous sommes allés à l'exposition "Edvard Munch, l’œil moderne" à Beaubourg.
Cette exposition a lieu du 21 septembre 2011 au 23 janvier 2012

Présentation de l'exposition, par Angela Lampe et Clément Chéroux, conservateurs au musée national d'art moderne :
"Edvard Munch est parfois considéré comme un artiste du 19e siècle, un peintre symboliste ou pré-expressionniste. Une idée reçue en fait aussi un artiste reclus, en proie à de violentes angoisses, dépressif, une âme tourmentée. L'exposition montre, à rebours de cette mythologie, que Munch était ouvert aux débats esthétiques de son temps, et qu'il a entretenu un dialogue constant avec les formes de représentation les plus contemporaines : la photographie, le cinéma et le théâtre de son époque. Il ira jusqu'à faire lui-même l'expérience de la photographie et du film, osant des autoportraits qu'il est sans doute le premier à avoir réalisés, à bout portant, en tenant l'appareil d'une main : « J'ai beaucoup appris de la photographie, déclare-t-il. J'ai une vieille boîte avec laquelle j'ai pris d'innombrables photos de moi-même. Cela donne souvent d'étonnants résultats. Un jour lorsque je serai vieux, et n'aurai rien d'autre de mieux à faire que d'écrire mon autobiographie, alors tous mes autoportraits ressortiront au grand jour. » (Edvard Munch, interviewé par Hans Tørsleff, 1930)

Munch était pleinement « moderne », c'est la thèse que défend cette exposition que lui consacre le Centre Pompidou, avec cent quarante oeuvres, dont une soixantaine de peintures, cinquante photographies en tirages d'époque, des oeuvres sur papier, des films et l'une des rares sculptures de l'artiste. A travers neuf thèmes, elle présente un ensemble comme il a rarement été possible d'en voir, associé à ses expérimentations photographiques et filmiques."

Edvard Munch (prononcer « Mounk ») peintre norvégien (1863-1944) est considéré comme le pionnier de l'expressionniste.

Edvard Munch

Munch était pleinement « moderne », c'est la thèse que défend cette exposition que lui consacre le Centre Pompidou, avec cent quarante oeuvres, dont une soixantaine de peintures, cinquante photographies en tirages d'époque, des oeuvres sur papier, des films et l'une des rares sculptures de l'artiste.

deux êtres humains-Les solitaires_1933-1935


Les jeunes filles sur le pont_1901


Deux êtres humains. Les solitaires_1905

Munch s'attachait à saisir les troubles émotionnels ponctuant les différents moments de l'existence. "Puberté" montre une adolescente nue prostrée, les épaules rentrées les bras croisées. Peinture aux couleurs sombres, il en émane une grande solitude.

Puberté_1895-1896

"L'enfant malade" toile commandée par un collectionneur est une copie réalisée par Munch d'après l'une des oeuvres majeures de ses premières années. "Avec l'enfant malade" écrit-il "je m'engageais dans une voie nouvelle-il y avait une rupture dans mon art-la plus grande partie de ce que j'allais réaliser plus tard a pris naissance dans cette toile" Et pourtant la toile avait fait scandale, pour son aspect inachevé lors de son exposition au salon d'automne de Kristiana (Oslo) en 1886. Celle-ci évoque le souvenir du décès de sa sœur aînée Sophie. Le thème de la maladie est alors très en vogue chez les artistes naturalistes norvégiens de l'époque. Munch a réalisé 6 variantes de ce tableau entre 1885 et 1927.
A l'instar de ce tableau Munch travaillera toute sa vie à multiplier le même sujet.

l'enfant malade_1925

"Le Baiser sur la plage au clair de lune", Munch a réalisé 10 versions différentes du Baiser à partir d'une 1er toile peinte en 1897. Au fil des ans, il essaie différents schémas de composition. Le couple s'embrasse, nu ou vêtu, près d'une fenêtre ou sur la plage, comme si la peinture inter changeait les décors d'une même scène de théâtre qui se répète à l'infini.
Munch était adepte de l'autocitation. Le reflet de la lune en forme de "i" est un motif récurrent des paysages qu'il peint à Asgardstrand à partir des années 1890.
Le Baiser est par ailleurs l'un des sujets majeurs du grand projet moderne que Munch a intitulé "La Frise de la vie" et qu'il décrit ainsi :"La Frise est conçue comme une série dont l'ensemble constitue un panorama de la vie. Tout au long courent les ondulations du même rivage. Au delà s'étend la mer, en perpétuel mouvement. Sous les arbres, la vie se déroule dans toute sa part de joies et de souffrances."

Le baiser sur la plage au clair de lune_1914
 
Copies, reprises, variantes, Munch n'a cessé de revenir sur des sujets qu'il avait déjà abordés.
Six versions de "l'enfant malade", autant de "jeunes filles dur le pont", une dizaine de vampire. A rebours de l'unicité romantique il est dans doute, l'artiste de sa génération qui a posé avec le plus d'acuité la question fondamentale pour l'art du XXe siècle de la reproductibilité de l'oeuvre d'art. Les raisons de cette redite peuvent être multiple : la toile a pu être détruite ou vendue, un collectionneur a commandé une nouvelle version, ou alors le peintre souhaite approfondir le motif ou l'inclure dans un nouveau projet de Frise.

"Le baiser", "le vampire" "le cri"... font partie des tableau majeurs de l"la Frise de la vie"

vampire dans la forêt-1916-1918

Munch comme Bonnard, Vuillard ou Mucha fait partie de cette génération de peintres qui se sont emparés de la photographie en amateurs.
En dehors de quelques images représentant ses tableaux ou certains lieux, Munch réalise principalement des autoportraits. Dans une interview de 1930, Munch déclarait "un jour lorsque je serai vieux, et n'aurai rien d'autre de mieux à faire que d'écrire mon autobiographie, alors tous mes portraits ressortiront au grand jour.
Deux salles sont dédiées aux photos de Munch

La plage d'Asgardstrand vers1904


Autoportrait dans le jardin


Autoportrait au 53 quai Am Strom à Warnemunde _ 1907


Autoportrait vers 1906


autoportrait avec chapeau à Ekely_1930


autoportrait avec chapeau à Ekely_vers 1930



autoportrait avec chapeau à Ekely_1930


autoportrait avec chapeau à Ekely_1930

Dans les années 1880-1890, les peintures de Munch sont marquées par l'Impressionnisme mais aussi par le japonisme.
Les perspectives sont accélérées, les lignes de force très obliques et le premier plan est proéminent.
Ce dernier est souvent coupé par le 1er plan du tableau ce qui accentue la profondeur.

travailleurs rentrant chez eux_1913-1914


la vigne vierge roue_1900


le cheval au galop_1910-1912


le tronc jaune_1912


Thorvald Lochen

Plusieurs témoignages indiquent que Munch aimait les magazines illustrés. Ses archives en conservaient beaucoup dont certains reproduisent des portraits en marchant. Munch s'en est souvenu au moment de peindre le portrait de l'avocat norvégien Thorvald Lochen

jalousie_1907

Cette toile fait partie d'un ensemble d'environ 10 tableaux, intitulé "la chambre verte", réalisé sur la côte du nord de l'Allemagne, cette scène s'inscrit dans la continuité de l'expérience théâtrale à laquelle Munch a participé l'année précédente au sein du nouveau théâtre intime de Berlin.

La meurtrière_1907


A la douce jeune fille_1907

Son Directeur avait incité Munch à venir réaliser les décors pour "Les Revenants" d'Henril Ibsen.

A l'instar du dispositif scénique conçu pour réduire la distance entre acteurs et spectateurs, Munch installe ses personnes dans une sorte de boite ouverte d'un seul côté.
Le décor augmente l'atmosphère étouffante. L'année suivante Munch es hospitalisé pour dépression nerveuse

décor pour la pièce d'Henrik Ibsen, "les revenants"_1906


Homme et femme près de la fenêtre avec des plantes en pot_1911


Homme et femme_1913-1915


L'artiste et son modèle_1919-1921

Une fois guéri de la grippe espagnole, Munch se retire dans sa propriété d'Ekely. Il réalise d'avantage de nus et continuera à peindre des modèles féminins jusqu'à la fin de sa vie. Il est la plupart du temps proche de ses modèles, ce qui sert son dessein de représenter la spécificité de son sujet. Il cherche à déceler les sentiments profonds qui gouvernent les femmes qu'il peint pour rendre leurs portraits plus puissants.

Combat contre la mort_1915

Pour "Le combat contre la mort" Munch met en scène le souvenir du décès de sa soeur Sophie, survenu en 1877.
Entre 1893 et 1915, l'artiste exécute sous différents titres, 4 toiles, plusieurs dessins et une litho autour du thème de la mort.
Cette version diffère de la 1er, Munch a découvert Van Gogh et a fait l'expérience de l'expressionnisme et du théâtre d'avant-garde.
Les taches rouges sur les murs de la pièce ainsi que les puissants effets d'ombre et de lumière contribuent à créer une atmosphère dramatique

la chambre du mort_vers 1915

De sa rencontre avec Rosa Meissneer en 1907 naîtront de nombreuses oeuvres. "Femme en pleurs" sera réalisé sous forme de toiles mais aussi de dessins de photographies de lithographies et donnera même naissance à une sculpture en bronze

Femme en pleurs_1907-1909


Femme en pleurs_1907


Femme en pleurs_1907-1909


Femme en pleurs_1907


Nu en pleurs_1907_bronze


L'oeuvre de Munch est ponctuée de paysage

Nuit étoilée_1922-1924
 
S'ils sont la plupart du temps peuplés de personnages, ils en sont aussi parfois dénués. Dans tous les cas ils reflètent l'état d'âme du peintre suivant en cela la tradition romantique.

A la suite de son hospitalisation pour dépression nerveuse en 1908, on observe dans l'oeuvre de Munch une vénération pour la nature dont le soleil peut être considéré comme l'emblème. Le peintre élabore ce motif pour répondre à une commande de l'université de Kristiana à laquelle il travaillera entre 1910 et 1916.

Le soleil_1910-1913 

La lumière est ici qu'une manifestation extériorisées de ses ondes magnétiques qui pour l'artiste animent le monde.

L'une des caractéristiques de la peinture de Munch au 20e siècle par rapport à celle du 19e siècle c'est qu'elle s'éloigne de la représentation réaliste pour se décomposer en taches de couleurs, découpe des formes, lignes accentuées.

L'homme à la luge_1910-1912


La maison brûle_1925-1927


Enfants dans la rue_1910-1915


Femmes au bain_1917

Munch commence à s'intéresser au monde du travail vers 1908-1909, au moment de la construction du chemin de fer entre Oslo et Bergen.
Cet évènement semble avoir fasciné l'artiste.

travailleurs dans la neige_1910

Munch prête un grand intérêt à cette culture politique moderne, qu'il découvre par l'intermédiaire de l'ouvrier suédois Kristoffer Stoa qui lui sert de modèle pour le travailleur situé au 1er plan de la toile



marins dans la neige_1910-1912


homme noir et jaune dans la neige_1910-1912
 
En 1905, lors d'un dîner une violente dispute éclate. Le peintre Ludvig Karsten, invité aurait mis en doute le sentiment national de Munch. En 1916, puis en 1932 des années après cet évènement, il reprend le sujet en réalisant plusieurs oeuvres, intitulé "la bagarre".

la bagarre_1932
 
Karsten figure à l'arrière plan tandis que Munch se tient à l'avant, tombant presque dans l'espace du spectateur.


Les hôtes indésirables_1932-1935
 
La dispute inspire à Munch le tableau "les hôtes indésirables" où le peintre menace ses deux convives avec un fusil

la bagarre_1932-1935

On observe chez Munch de nombreuses oeuvres des manifestations de dédoublement physique. Le peintre exprime souvent la sensation de marcher à côté de lui même, un effet renforcé par l'alcoolisme et la dépression

 
De nombreux autoportraits de Munch jalonnent l'oeuvre de Munch qui de même que ses photographies est très égocentrée. Il scrute les expressions de son visage, les changements de ses traits. On compte plus de 24 autoportraits.

autoportrait à Bergen_1916


le noctambule_19123-1924


autoportrait à la clinique__1909


autoportraits avec bouteilles_1938


autoportrait à 2heures et quart du matin_1940-1944


autoportrait_1940-1943


autoportrait avec la grippe espagnole_1919


autoportrait près de la fenêtre_vers 1940

Enfin, cette toile majeure, pour laquelle Munch a réalisé de nombreuses études préparatoires, fait partie des derniers autoportraits de l'artiste.
Face à lui-même, celui-ci interroge sans concession la finitude de l'existence entre une horloge sans aiguille symbole d'un temps désormais écoulé et un lit présage de la mort prochaine.
Munch est debout dans une position hiératique.
Derrière lui 2 portes entrouvertes laissent entrevoir une pièce.
Les murs constellés de tableaux témoignent du chemin parcouru par l'artiste

autoportrait entre l'horloge et le lit_1940-1943
Munch mourra l'année suivante.



Texte de Paulette Gleyze

Photos de Paulette et Gérard Gleyze



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