Nous voilà au 3e jour de notre voyage.
Un dernier regard sur la citadelle de Shkodra et nous partons vers le sud pour Durrès et ensuite Berat.
Durrès.
Durrès est un port important depuis l'Antiquité. Il est aujourd'hui le principal port albanais et la deuxième plus grande ville d'Albanie après Tirana.
Dans l'Antiquité, elle a été connue sous les noms d’Épidamne, puis Dyrrhachium. Elle était le point de départ de la via Egnatia, qui traversait l'actuelle Albanie et la Grèce jusqu'à Byzance.
Pendant la période de la dictature d’Ender Hoxja, la ville étant une zone militaire stratégique, les habitants et les déplacements étaient étroitement surveillés. Dans les années 1990, s’y sont tenues de nombreuses manifestations qui ont contribuées à la chute du régime.
Aujourd’hui Durrès est sur la voie du développement économique. On y trouve des industries de matières plastiques, de caoutchouc, de produits chimiques et électroniques. Le groupe italien Italcementi qui produit des matériaux de construction est installé à Durrès depuis 1998. Des industries polluantes donc.
La région produit du vin, du maïs, de la betterave à sucre et du tabac.
Hélas architecturalement parlant, nous ne voyons rien de très élégant. Les constructions sont très disparates. Des bâtiments de plus de 10 étages sont en construction. Sur certains bâtiments, on rajoute chaque année deux étages sans tenir compte de la zone sismique du lieu.
Nous pouvons voir aux alentours d’anciennes raffineries chinoises abandonnées et délabrées de véritables verrues dans la ville.
Bref la ville n’a aucun attrait architectural, mais deux centres d’intérêt importants : l’amphithéâtre romain et le musée d’archéologie.
L'amphithéâtre de Durrès a été construit au IIe siècle de notre ère sous le règne de l'empereur romain Trajan et est situé au milieu de la ville. Il pouvait accueillir jusqu'à 20 000 personnes.
Il a été redécouvert au XXe siècle. Il est aujourd'hui un lieu touristique important, mais il a beaucoup souffert et souffre encore aujourd’hui des constructions qui ont été bâties sur les côtés. Le développement de la ville le menace.
Il semblerait que les élus veulent supprimer les maisons qui se situent dans les environs de l'amphithéâtre, afin de le protéger.
L'amphithéâtre est construit sur la pente de la colline et a une forme elliptique. L’arène mesure 61 mètres sur 42 mètres.
Dans la chapelle se trouvent de belles mosaïques qui ont néanmoins subies l’outrage du temps.
En 2013, l'amphithéâtre est sélectionné avec treize autres sites par Europa Nostra comme l'un des sites les plus menacés du patrimoine culturel en Europe.
Le site est aujourd'hui candidat pour intégrer la liste du patrimoine mondial de l'Humanité de l'UNESCO.
Après la visite de l'amphithéâtre nous faisons une visite au riche et beau musée archéologique qui est le plus grand d’Albanie.
Il est consacré à l'histoire de la ville de l'Antiquité grecque à la période romaine.
La plupart des objets exposés ont été découverts par hasard lors de chantiers de construction ou par des paysans labourant des champs. Une partie des collections a été pillée lors de la guerre civile de 1997.
Après moultes péripéties le musée a ouvert ses portes en 2015.
Le 1er étage est prévu pour la période byzantine mais pour l'instant, il est toujours fermé.
Dans les salles du rez-de-chaussée sont magnifiquement exposées les antiquités grecques, les antiquités de la période hellénistique et de la période romaine.
L'exposition est organisée de manière chronologique et est parfaitement expliquée et agrémentée de cartes explicatives.
Nous pouvons voir une riche collection constituée de figurines votives en terre cuite du IVe au IIe siècle av. J.-C. et découvertes au nord-ouest de la ville sur le site de Daüte dans les années 1970.
Depuis 2002, le musée travaille en collaboration avec une équipe de chercheurs français de Lille pour sauvegarder ces milliers de statuettes et les analyser.
Elles sont pour l’essentiel des représentations d'Aphrodite.
Ce musée vaut grandement le détour.
Après le musée archéologique nous prenons la route pour Berat.
Berat
Berat est connue sous le nom de la « ville aux mille fenêtres »., en référence aux façades de ses maisons ottomanes collées les unes aux autres.
La ville est composée de 2 parties, la vieille ville, dont le centre historique est classé au patrimoine mondial de l'Unesco, depuis l'année 2008, et la ville plus récente, qui ne présente pas d'intérêt historique particulier.
Fondée il y a plus de 2 500 ans, la ville de Berat s'étale de part et d’autre de la rivière Osum. Gorica, le quartier chrétien, est située sur sa rive gauche, tandis qu'on trouve sur la rive droite Mangalem, le quartier musulman, et la Kala, la forteresse, sur les hauteurs.
Berat une des plus vieilles villes d’Albanie, existe depuis le VIe siècle avant JC. Elle était utilisée comme forteresse par les tribus Dasaretes d'Illyrie.
La citadelle est perchée sur le flanc de la montagne.
Notre guide Eduart, nous conduit dans un restaurant dans la vieille ville à l’intérieur des remparts et qui domine la ville.
Le propriétaire, fort sympathique s’est fait une joie (et pour mon plus grand plaisir), de me faire découvrir sa collection d’objets familiaux anciens.
Après le déjeuner nous flânons à l’intérieur des remparts dans les ruelles qui montent à la citadelle.
Elles sont bordées de charmantes maisons traditionnelles blanches de la période ottomane. On y voit encore de nombreux édifices médiévaux : des églises, des mosquées, les murailles crénelées, les réservoirs d'eau enterrés...
Eduart nous a expliqué comment les Albanais de toute confession ont la capacité à vivre ensemble et en paix.
La preuve nous en est donnée ici par la proximité des différents lieux de prières catholiques, orthodoxes et musulmans.
Dans ces petites ruelles pavées qui grimpent entre de très vieux murs, on peut ainsi passer de l’Église Saint-Théodore à la Cathédrale de la Dormition, puis à la Mosquée Rouge (en ruine aujourd’hui).
Nous visitons tout d’abord un petit joyau. C'est l'église orthodoxe de St Nicolas en brique rouge qui abrite des fresques du 16e siècle, d’une grande beauté et très bien conservées. Elles représentent les prophètes. La date de construction, 1591, est attestée par l’inscription sur une des fresques.
Pour la protection des peintures les photos sont interdites.
Quelques ruelles plus loin, nous visitons le musée du célèbre peintre d’icônes albanais, Onufri.
Onufri est un peintre albanais du XVIe siècle célèbre pour son style réaliste et pour avoir introduit la couleur rose (auparavant inusitée) dans les icônes.
Les icônes ont une très grande importance dans le rite orthodoxe.
Le musée des icônes se situe dans l’enceinte de l’église Ste Marie, construite en 1797.
L’exposition des icônes est riche. Outre les icônes d’Onufri nous pouvons admirer des peintures de peintres iconographes du XVIe au XXe siècle. Des peintres comme David Selenica, Kostantin Phpataraku, les fils d’onufri…
Les œuvres sont exposées dans plusieurs salles, sur des panneaux de bois finement sculptés. Les couleurs sont incroyablement chatoyantes.
Nous visitons également l’église et sa nef entièrement peinte. L’iconostase de l’église présente des icônes dont la plupart sont de Joan Cetiri.
Hélas les photos sont interdites.
A l’époque du communisme, dans le monastère qui abrite le musée Onufri, deux Codex ont été découverts, ils datent du VIème siècle et IXème siècles ap. JC.
Il s’agit du Codex Purpureus Beratinus, composé du Codex Beratinus 1 et du Codex Beratinus 2.
Beratinus 1, du VIe siècle, est constitué de 190 pages, la majeure partie de l'Évangile selon Matthieu et l'Évangile selon Marc. Il est manuscrit en lettres onciales. Il représente un des trois ou quatre archétypes les plus anciens du Nouveau Testament.
Beratinus 2, du IXe siècle est constitué de 420 pages. Il contient des textes d’Évangile de la période des textes standard. Certains paragraphes sont en écriture semi-onciale. Il contient les quatre Évangiles complets.
Ils sont aujourd’hui conservés à Tirana et classés au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Nous poursuivons la grimpée vers la citadelle sous un soleil de plomb.
Le long du chemin les habitants exposent leur production artisanale.
Arrivés sur le plateau, nous voyons les ruines du château Gorica qui date du IIIe et IVe siècle av JC, en haut de la forteresse. Les fouilles archéologiques ont montré que l’habitat existaient sur le lieu depuis l’âge du bronze et que la 1ère forteresse date de l’âge du fer. Depuis l’occupation romaine au IIe siècle avant JC, personne n’a habité dans le château.
Du site nous avons une magnifique vue plongeante sur l’église byzantine de la Ste Trinité avec ses briques rouges qui est agrippée à la falaise.
Le plateau offre un superbe panorama sur la ville,
mais aussi sur la rivière Osum
et sur la montagne de Tomorr qui culmine à 2416m.
Cette montagne est connue pour le pèlerinage des Bektâchi, 2e religion la plus pratiquée en Albanie.
En Albanie, comme en Grèce, l'eau est stockée dans des cuves perchées sur les toits.
Nous redescendons dans la plaine, dans le quartier de Mangalem.
Mangalem est un des quartiers historiques les mieux conservés. Dans la partie inférieure du quartier, il y a 3 anciennes mosquées, la mosquée du sultan construite au XVIe siècle( une des plus anciennes d'Albanie), la mosquée des Plombs appelée ainsi car ses dômes étaient recouverts de plomb et la mosquée des célibataires construite au XIXe siècle.
la mosquée des célibataires
Tout près se trouve les vestiges de la maison du sultan qui date du XVIe siècle.
et l'église orthodoxe
et catholique
Accrochées à la colline au pied de la citadelle, sur la rive droite de la rivière Ossum, nous sommes impressionnés par le nombre de fenêtres qui a donné à Berat, le surnom de « la ville aux mille fenêtres".
Le bord de la rivière était utilisé autrefois comme un lieu de bazar typique.
Les maisons sont très proches des unes des autres. Cette conception architecturale unique est une merveilleuse attraction du quartier de Mangalem.
La 3e journée s'achève sur un repas albanais dans un restaurant en terrasse (photo ci-dessus)
Demain nous partirons pour Apollonia et Vlora.
Texte de Paulette Gleyze
Photos de Paulette et Gérard Gleyze
superbe voyage... on en reparlera à l'occasion
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