Encore sous le charme de Butrint, nous reprenons le car et partons pour l'incroyable Fontaine "the blue eye" ou Syri i Kaltër en albanais,
et ensuite pour Gjirokastra, la ville natale d’Ismail Kadaré.
The Blue Eye en albanais : Syri i Kaltër est une source d'eau et un phénomène naturel se produisant près de Muzinë dans le comté de Vlorë , au sud de l' Albanie .
L'eau bleu clair de la rivière sort d'une source dont on ne connait pas la profondeur. Les plongeurs sont descendus à cinquante mètres, mais on ne sait toujours pas quelle est la profondeur réelle de ce trou karstique.
C'est la source de la rivière Bistricë, de 25 km de long, qui se termine par la mer Ionienne au sud de Sarandë.
Elle se situe à 152m d'altitude dans une zone naturelle composée de chênes et de sycomores.
Elle a un débit de 18400 l / s.
Gjirokastër ou Gjirokastra se situe dans le sud de l'Albanie, à 35km de la frontière avec la Grèce et est inscrite depuis 2005 sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO.
La partie historique de Gjirokastra est un exemple rare de ville ottomane bien préservée, construite autour de la citadelle du XIIIe siècle.
Gjirokasta doit sa renommée à deux personnages célèbres natifs de la ville : le dictateur Enver Hoxha et l’écrivain francophile Ismail Kadaré.
A l’arrivée à Gjirokastra nous sommes « accueillis » par la citadelle érigée sur un éperon rocheux dominant la ville à 336 m d'altitude.
Cette immense forteresse (600 m de longueur et 70 m dans sa partie la plus large) a été construite par les despotes de l'Épire à partir du XIIe s. Elle permettait de contrôler les communications dans la vallée.
Elle a été prise par les Ottomans en 1414 et conquise par Ali Pacha en 1811.
Ce dernier développe la citadelle et fait construire un aqueduc de 10 km de longueur apportant l'eau depuis le pied du mont Sopo pour approvisionner en eau potable la citadelle. Cet aqueduc a fonctionné jusqu'en 1932 année où il a été détruit.
À partir des années 1930, sous le règne du roi Zog, la forteresse est transformée en prison puis utilisée comme telle aussi bien par les Italiens, les Allemands que par le régime totalitaire d'Enver Hoxha et ce jusqu'en 1968.
Aujourd’hui elle est transformée en musée où est exposé du matériel militaire de l'armée albanaise utilisé entre 1913 et 1970 : une vingtaine de pièces d'artillerie, de mortiers, de canons anti-aériens ainsi qu'un char léger italien de modèle Fiat L6/40 capturé en 1944.
Du fait de l'épaisseur des murs, et malgré les fenêtres et l'éclairage, nous avançons dans la pénombre au milieu des armes…ce n’est pas très rassurant !
Nous débouchons sur les remparts.
qui offrent une vue magnifique sur la ville.
Sur le rebord gît la carcasse d'un avion de l'armée de l'air américaine Lockheed T-33 Shooting Star, forcé d'atterrir près de Tirana le 23 décembre 1957 alors qu'il survolait l'espace aérien albanais.
En pleine guerre froide, le pilote a été capturé, accusé d'espionnage avant d'être relâché deux semaines plus tard grâce à l'intervention de l'ambassadeur français.
L’appareil a été exposé comme un avion-espion alors qu’il s'agissait d'un appareil d'entraînement qui effectuait des liaisons entre les bases américaines de Châteauroux et de Naples.
En continuant sur l’esplanade nous arrivons sur un espace où se dresse une scène construite en 2000 pour le Festival national folklorique de Gjirokastra qui se déroule tous les cinq ans.
C'est à cet emplacement qu’ont été découvertes en 1983-1984 les plus anciennes traces d'habitat de la ville : des tuiles et poteries datant du IVe au IIe s. av. J.-C.
A l'extrémité de la citadelle, se dresse la tour de l'horloge édifiée au début du XIXe peu après la prise de la ville par Ali Pacha à l'emplacement d'une ancienne église orthodoxe. Elle servait comme les traditionnelles horloges ottomanes à indiquer l'heure des prières aux fidèles musulmans, rythmant le temps de la cité.
Son mécanisme très élaboré (prenant en compte le décalage progressif de la durée du jour) a cessé de fonctionner durant la Première Guerre mondiale et a depuis disparu.
Au pied de la tour, se trouvent des casemates, des entrepôts de munitions et le poste de commandement de l'artillerie dominant la vallée du Drin.
La partie ancienne de la ville s’étend sur les pentes du massif Mali i Gjerë (« la Grande Montagne») culminant à 1 800 m d'altitude et les quartiers modernes jusqu’aux rives du Drin (ou Drinos).
En 1914, Georgios Christakis-Zographos, alors ministre des Affaires étrangères de Grèce, proclame Gjirokastre capitale de l’État autonome de l’Épire du nord.
Gjirokastër a été occupée par les troupes françaises pendant la 1erguerre mondiale et passe sous le contrôle italien en 1939, puis grec en décembre 1940 et allemand, et redevint définitivement albanaise en 1944.
Sous le régime communiste de l’après-guerre elle a été élevée au rang de « ville-musée » parce qu’Enver Hoxha, premier secrétaire du Parti du travail d'Albanie, y est né en 1908.
Sa maison natale, transformée en musée, devient pendant cette période un des principaux centres du culte de la personnalité du dictateur.
L’architecture se caractérise par la construction d’un type de maisons à tourelle, le « kule » turc, qui s’empilent en gravissant en pente dans les vieux quartiers de Mali i Gjerë.
Certaines maisons, (les kulle), sont encadrées de tours défensives. Elles font penser à de petites forteresses groupées, comportant un rez-de-chaussée surélevé, un premier étage utilisé à la saison froide et un deuxième étage servant pour la saison chaude. Elles sont recouvertes d’enduit blanc.
Nous faisons une très belle visite à la Skenduli House. C’est
une très grande demeure du XVIIIe siècle occupée par la même famille depuis 9 générations. La visite est faite par un descendant passionné de cette famille qui parle le français
C’est une maison ottomane située dans la vieille ville. Cela nous permet de voir le mode de vie de l'époque ottomane. Sous le régime communiste le bâtiment était partagé entre plusieurs familles.
L’intérieur est orné de riches détails décoratifs et de motifs floraux peints.
A la fin de la visite, en hommage à la France, il nous récite le corbeau et le renard de Jean de La Fontaine, chante le chant des partisans et nous offre des bonbons. Un vrai moment de convivialité.
Le bazar date du XVIIe siècle et a permis à Gjirokastre de commercer broderies, soieries et son fameux yaourt.
Il a été reconstruit au XIXe siècle suite à un incendie et il a été fort endommagé en 1997 lors de la guerre civile.
Gjirokäster, bien qu’elle ne soit jamais nommée, est le sujet principal d’un roman en grande partie autobiographique d’Ismail Kadare : Kronikë në gur, 1971 (trad. Edmond Tupia, Chronique de la ville de pierre, Hachette, 1973) : " C’était une ville penchée, peut-être la plus penchée au monde, qui avait bravé toutes les lois de l’architecture et de l’urbanisme. Le faîte d’une maison y effleurait parfois les fondations d’une autre et c’était sûrement le seul lieu au monde où, si l’on glissait sur le côté d’une rue, on risquait de se retrouver sur un toit. [...] En marchant dans la rue, on pouvait par endroits, en étendant un peu le bras, accrocher son chapeau à la pointe d’un minaret. Bien des choses y étaient bizarres et beaucoup d’autres semblaient appartenir au royaume des songes."
Demain nous partons pour Permet et Rehove.
Texte de Paulette Gleyze
Photos de Paulette et Gérard Gleyze
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