Le 09 mars 2022, nous visitons Châteauneuf en Auxois, situé à une quarantaine de kilomètres à l'ouest de Dijon.
L'histoire de Châteauneuf débute vers 1130, quand Jean de Chaudenay, seigneur local, décide de faire construire un château pour son fils cadet Jehan à quelques lieues de sa demeure.
Jehan prend possession du "château neuf" en 1175. Comme le veut la coutume médiévale, il adopte le nom de sa nouvelle terre, "Castro Novo" qui devient Châteauneuf afin de le distinguer de l’ancien château de Chaudenay
Il en fait le chef-lieu d'une nouvelle Seigneurie.
Il va inciter et favoriser l'implantation de nouveaux habitants avec des Chartes de franchise, des marchés et des foires annuelles, des fortifications...
La richesse des habitants les plus aisés, les Bourgeois, se ressent au travers l'architecture des maisons encore visibles dans le village. Ce dernier connaît son apogée à partir de la 2ème moitié du XVe siècle, mais la révolution industrielle et l'exode rural portent un coup au développement du village dans le 2e moitié du XIXe siècle, qui se dépeuple.
Châteauneuf en Auxois se redéveloppe quelque peu à partir des années soixante avec le développement du tourisme.
Le Comte Georges de Vogüe fait classer le château Monument historique et en fait don à l'Etat en 1936 sui le cède à la Région Bourgogne-Franche-Comté en 2008.
Aujourd’hui, le village de Châteauneuf est adhérent à l’association "Les Plus Beaux Villages de France".
En 2021, il est candidat de la région Bourgogne-Franche-Comté pour le concours télévisé "Le Village préféré des Français", animé par Stéphane Bern.
Le village est construit sur un promontoire rocheux à 475 mètres d’altitude. La forteresse domine la vallée surplombant la plaine de l'Auxois et le Canal de Bourgogne. Le panorama est magnifique.
Nous entrons dans le village par la porte nord.
Dès la fin du Moyen-Âge, une enceinte entourait Châteauneuf, complétée par plusieurs tours et trois portes.
La porte nord construite à la fin du XVIe siècle est l'un des vestiges de la fortification du village. Il y figurait le blason et la devise (aujourd'hui disparus) de la famille de Vienne, alors propriétaire du village. A la Révolution ils ont disparu et remplacés par l'inscription "Citoyen".
Devant le château, le village est ordonné en plan régulier.
Les Seigneurs sont à l'origine de plusieurs fondations, comme la chapelle et l'hôpital, hors de l'enceinte du château. Ils ont également créé des marchés et des foires.
Le village a été longtemps un carrefour économique où s’échangeaient les bois des hauts plateaux, les céréales et les productions animales de l’Auxois et les vins de la région de Beaune.
Les belles demeures des nobles ou des riches marchands bourguignons des XIVe, XVe et XVIe siècles aux façades parfois ornées de tourelles et percées de fenêtres à meneaux attestent de cette période prospère.
Le nom des places – place du marché, aux bœufs, aux cochons… est aussi évocateur de cette période.
Cette maison du XVe siècle est la seule de Châteauneuf à avoir conservé un étage à pan de bois. La maison a été remaniée à plusieurs reprises mais conserve encore des éléments d'architectures du Moyen Âge.
La maison aux moutons (monument historique) est dotée d'une tourelle en façade. Elle reflète ce qu'est une maison bourgeoise à Châteauneuf à la fin du XVIe siècle. Les chambranles de la porte et des fenêtres présentent un décor d'oves et de feuilles d'acanthe. Le blason qui orne la porte était sans doute peint à l'origine. Le cadran solaire de la tourelle est daté de 1588.
Il est orné d'un relief orné représentant un mouton, ce qui a donné son nom à la maison.
La maison Saint Georges (monument historique), date du XVe siècle. Elle était la demeure d'une famille aisée du Moyen-Âge. Cette maison Saint Georges (ou maison du Chevalier) doit son nom au relief de pierre sculpté placé au dessus de la porte et représentant un cavalier passant. La devise latine placée en dessous du chevalier (in Domino Confido) signifie littéralement "j'ai confiance en Dieu". Le relief est daté de 1588.
La maison Bichot datée de 1588 appartenait à l’une des plus anciennes et notables familles de Châteauneuf, anoblie en 1629. La façade comporte une porte couverte d’un arc en plein-cintre et de plusieurs baies.
Le blason au-dessus de la porte représente une biche et un os.
Les halles actuelles ont été bâties en 1840 pour abriter le marché hebdomadaire au rez de chaussée et l'école du village à l'étage.
A l'emplacement de ce bâtiment existaient d'anciennes halles médiévales dont la première mention remonte au milieu du XVe siècle. Le devis de 1835 décrit les anciennes halles "l'ancien bâtiment de la halle est entièrement en ruine et il serait dangereux de continuer plus longtemps à s'en servir". Les halles et la place du marché étaient le cœur économique de Châteauneuf où se déroulaient les marchés mais aussi les foires annuelles, trois à la fin du Moyen-Âge et six à la fin du XIXe siècle.
L'échoppe du potier d'étain (monument historique). La maison doit son nom à la présence de l'atelier d'un potier d'étain. La maison date du XVe siècle mais la tour qui abrite l'échoppe avec ses fenêtres vitrines a été construite plus tardivement et pourrait dater du XVIe ou XVIIe siècle.
L'église Saint Philippe-Saint Jacques est mentionnée pour la 1ère fois en 1303 dans une reconnaissance de Cens (loyer) d'une "maison située devant l'église de la ville de Châteauneuf". Le bâtiment actuel a été construit à la fin du XVe siècle par Philippe Pot. Une analyse dendrochronologie a déterminé que la charpente a été mise en place en 1490. l'église en croix latine a une architecture gothique de la fin du Moyen-Âge. De nombreuses altérations et restaurations de puis la fin du XVIIIe siècle ont modifié l'édifice médiéval, notamment le clocher détruit par la foudre en 1779.
Le château, flanquée de hautes tours, avec ses logis de style gothique et ses larges fossés que traverse un pont-levis, contrôle l’ancienne route ralliant Dijon à Autun.
Il a conservé ses tours, ses fossés ses murailles édifiés au XIIIe siècle
Dix seigneurs répartis sur neuf générations se sont succédé durant trois siècles dans ce château.
Parmi eux, Philippe Pot à qui Philippe le Bon, Duc de Bourgogne, a offert la propriété, en 1456.
Conseiller privé du duc reconnu pour sa richesse, il apporte à l’édifice de nombreuses modifications. Il fait construire de nouveaux aménagements dont deux logis et une chapelle, restaurer la tour maîtresse, moderniser les dispositifs de défense et décorer tous ces éléments avec somptuosité.
A partir du XVIe siècle, de grandes familles telles que les Montmorency, les Vienne ou encore les Paris de Montmartel acquièrent successivement le château. C'est alors qu'une nouvelle alliance voit le jour, avec l'arrivée de la célèbre famille de Vogüe. Propriétaire du château de Vaux-le-Vicomte, elle détient Châteauneuf jusqu'en 1936 date à laquelle il en fait don à l'Etat.
Le pont levis flanqué de ses deux tours donne accès à la cour intérieure.
Des douves entouraient autrefois le château.
De la cour nous avons un point de vue unique sur chacun des bâtiments du château : le grand logis (vers 1470), la tour carrée ou donjon (13e siècle), la muraille (14e siècle), la tour d’entrée du 13e siècle , le chevalet d’entrée (15e siècle) avec la boutique, le logis des hôtes (1470), la tour sud (14e siècle ?), la chapelle (1281), le puits.
Le logis des hôtes
Le Grand Logis qui se visite a été construit puis transformé du XIIe au XVIIIe siècle.
Il se compose de plusieurs salles et appartements :
La chambre de Vienne, l’appartement privé d’un seigneur et la grande salle qui précède la chapelle.
La chambre de Vienne au premier étage de la tour carrée, se situe dans la partie la plus ancienne du château (12e-13e siècles). Elle est meublée avec des meubles d’époque.
On peut voir une table du 16e siècle en noyer, une chaise du Portugal du 17e siècle en noyer et cuir de Cordoue, une paire de chaises époque Louis XIII (17e siècle), un lit à baldaquin à la française, une armoire à deux corps, époque Louis XIV.
L’appartement privé du seigneur des années 1480-1500 au premier étage du Grand Logis.
Cette partie du premier étage du grand logis pavée de de carreaux de terre cuite lambrissés, a conservé l'aspect de l'appartement privé du Seigneur du 15e siècle.
Une cloison de bois (galandage) sépare l'espace en trois, composé d'une chambre, d'une pièce d'"aisances" (ou pièce d'eau) comprenant des latrines et une garde-robe. La grande chambre est chauffée par une grande cheminée et éclairée par deux grandes fenêtres à meneaux.
Les remarquables tapisseries proviennent de l'hôtel des Vogüe à Dijon. Elle ont été réalisées dans les Flandres vers 1600 et représentent la vie de Moïse.
L'ameublement est composé d'une table à rallonges en noyer du 16e siècle, d'un fauteuil style Henri II en noyer, d'un coffre-fort du 17e siècle en fer forgé, d'une armoire trois-quarts en chêne du 16e siècle, d'un lit à colonnes en hêtre, d'une chaise à bras du début du 17e siècle en noyer.
La plupart des meubles proviennes du musée des Arts Décoratifs de Paris.
La grande salle est aménagée dans le logis principal par Philippe Pot à partir des années 1470. Elle servait de pièce d’apparat pour les réunions publiques, les réceptions et les banquets. La devise de Philippe Pot “Tant L Vault” est visible sur la cheminée. Elle fait référence à la Vierge Marie. Cette grande salle se prolonge par la chapelle.
Les décors luxueux de cet appartement du 15e siècle sont d'époque et parfaitement conservés. Ils sont constitués de peintures murales et de tomettes. Il a été réaménagé aux 17e et 18e siècles, avec de beaux dessus-de-porte, par la famille de Vienne. Un ensemble de 7 tapisseries, tissé vers 1600 dans les Flandres, retrace la vie de Moïse.
La chapelle destinée aux offices religieux privés du Seigneur et de ses hôtes est consacrée en 1481. C'est l'une des premières réalisations de Philippe Pot qui la place sous la protection de la Vierge et de St Jean.
Les peintures à la détrempe représentent le Christ et les douze apôtres. On retrouve les bandes noires et rouges de la cheminée grande salle.
Une copie du tombeau de Philippe Pot est placée devant l'autel, initialement installé dans l'abbaye de Cîteaux. L’œuvre originale est aujourd'hui conservée au Musée du Louvre. Le tombeau est conçu pour glorifier le souvenir du défunt.
Une article de la revue "Connaissance des arts" nous comte l'histoire du tombeau de Philippe Pot : "En 1493, Philippe Pot est le propriétaire prestigieux du château de Châteauneuf. Il a fait reconstruire la tour maîtresse, deux magnifiques logis et a commandité de somptueux décors intérieurs à ses couleurs dans tout le château.
Il meurt à Dijon, au fait de sa gloire : il est alors gouverneur de la Bourgogne pour le compte du roi de France Louis XI.
Il a tout prévu pour ses obsèques : un magnifique tombeau l’attend à Cîteaux, une des plus prestigieuses abbayes de Bourgogne. Conservé jusqu’à la Révolution, le tombeau orne à présent les salles de sculptures du musée du Louvre. Une effigie de Philippe Pot idéalisée, sculptée et peinte avec précision repose sur une dalle portée par des pleurants, comme s’il partait pour sa dernière demeure. L’accent est mis sur les blasons de sa famille, arborés par les pleurants et sur toute la symbolique héraldique de la fin du Moyen Age : Philippe Pot, gisant, est revêtu d’une armure, comme un chevalier. Ses couleurs s’affichent partout. Un long texte gravé sur le côté de la dalle, probablement composé par lui-même, résume sa vie et ses actions au service des ducs de Bourgogne, puis du roi de France. Souhaitait-il laisser une bonne image de lui-même afin de passer à la postérité ? On ne le saura jamais.
Dans les années 1980, sous l’égide de Jean-Philippe LECAT (ministre de la culture), un moulage de cette œuvre est destiné au château de Châteauneuf. Il trône aujourd’hui dans la chapelle, devant l’autel.
Le château possède donc le seul moulage officiel fait sur l’original par les ateliers du Louvre. Il sera probablement le seul : l’original serait trop fragile pour supporter une autre épreuve de moulage."
Nous terminons la visite par le logis des hôtes.
Construit vers 1470 par Philippe Pot, la forteresse a été agrandie et remaniée dans le style gothique flamboyant par ce Sénéchal de Bourgogne.
La façade est agrémentée de jolies fenêtres à meneaux.
La salle est conservée en l'état sans plafond avec des murs nus.
Une niche à sel, les évacuations d'évier, les cheminées laissent supposer que le rez de chaussée a servi de cuisine.
A l'étage on devine un appartement.
L'histoire des 900 ans du château est exposé dans ce bel écrin avec des maquettes, des photos, des plans...
L’appellation "Châteauneuf" laisse supposer une première installation seigneuriale, peut-être une simple tour de pierre qui surveille et protège un petit bourg installé à la pointe de l'éperon avant 1200.
Dans la seconde moitié du 12e siècle, Jean de Chaudenay crée la seigneurie de Châteauneuf et la donna à son fils cadet, Jean.
Au 13e et 14e siècles, l'habitat seigneurial se structure avec une tour-résidence rectangulaire, puis cinq tours et une muraille percée d'une entrée fortifiée.
Entre les 12e et 14e siècles, la famille de Chaudenay possède de nombreux domaines entre Beaune et Pouilly. Le château de Châteauneuf est le centre de son pouvoir. Situé sur l'arrête rocheuse, le château est un château défensif.
Au XIVe siècle la terre de Chaudenay passe dans la famille de Vienne qui reprend aussi Châteauneuf.
Au XVe siècle, le Duc de Bourgogne Philippe le Bon reprend la seigneurie à Catherine de Châteauneuf accusée d'avoir empoisonné son mari. Il la confie en 1456 à son Chambellan Philippe Pot qui entreprend de l'agrandir en construisant deux corps de logis et une chapelle.
Né en 1428, Philippe Pot porte le même prénom que son parrain, le duc de Bourgogne. Le duc de Bourgogne lui donne l'office qui avait été attribuée à son grand-père Regnier. Grâce à ses talents de négociateur il est mandaté par le duc dans diverses missions diplomatiques. Chevalier de la Toison d’Or il rallie la cause du roi de France Louis XI qui lui donnera plus tard le titre de sénéchal de France.
Il meurt sans héritiers directs en 1493.
En 1551, Anne de Montmorency hérite de Châteauneuf par sa mère Anne, nièce de Philippe Pot. Il devient connétable, c'est à dire commandant des armées royales. C'est une famille de mécènes qui commandent bon nombre d’œuvres d'art que ce soit en architectures, qu'en arts décoratifs ou de l'enluminure. Sa veuve Madeleine de Savoie, réside parfois au château de Châteauneuf.
En 1627, Charles de Vienne et son épouse Marguerite achètent le château et s'installent dans le donjon. Leurs successeurs aménagent de petits appartements à l'étage du grand Logis.
Marguerite Fauche de Domprei appartient à une lignée de Franche-Comté. Depuis 1621, elle est l'épouse de Charles de Vienne, héritier d'une ancienne famille noble. Ils s'installent au 1er étage du donjon. Marguerite meurt en 1664. Leur fils Henri poursuit les travaux. Les Vienne cèdent le château en 1769. Leur dernière descendante Marie Comeau, meurt au château en 1777.
Devenu propriété de la famille de Vogüe depuis le début du 19e siècle, le château est donné en 1936 à l'Etat Français qui le cède à la Région Bourgogne en 2008.
Le château était entré dans la famille de Vogüe en 1802 à l'occasion d'un mariage. la famille possède de nombreux domaines en France et en Bourgogne. Utilisé comme résidence secondaire, le château est classé au titres des Monuments Historiques en 1894.
Le château de Châteauneuf est un chef-d’œuvre de l’architecture militaire bourguignonne. Ses murs polygonaux, construits au 13e siècle, entourent le donjon carré avec cinq tours circulaires.
Le village, inscrit parmi les Plus Beaux Villages de France, ne démérite pas de cette inscription.
Châteauneuf en Auxois a servi de lieu de tournage au film "Jeanne d'Arc" de Jacques Rivette en 1993.
Texte : Paulette Gleyze
Photos : Anne, Paulette et Gérard Gleyze
Merci Paulette pour ce très beau diaporama pleins de belles demeures avec de belles pierres .
RépondreSupprimermerci pour la visite ! En France on a du Pot ! des bises
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