Après la visite du musée Plantin Moretus et le déjeuner du 24 juillet 2024, nous visitons l'église Saint-Charles-Borromée située au cœur du centre historique près de la Grand Place et de la cathédrale Notre Dame, puis nous terminerons la journée par une visite au Musée Mas au bord de l'Escaut.
Construite entre 1615 et 1621 par les jésuites, l'église Saint-Charles-Borromée est un chef-d'œuvre du baroque flamand et est considérée comme l'une des plus belles églises baroques en Belgique.
Après la suppression de l'ordre des jésuites en 1773, elle a été consacrée à Saint Charles Borromée (1538-1584), qui était un cardinal né à Arona en Italie et un important réformateur catholique qui s'est appliqué à mettre en oeuvre les réformes décidées par le Concile de Trente (1545-1563) .
La riche décoration de la façade, le couronnement de la tour et les nombreuses sculptures sont l'oeuvre de Rubens.
L'église prend feu après avoir été frappée par la foudre en 1718.
Des marbres et 39 plafonds peints par Rubens sont détruits.
L'intérieur de l'église est élégant et riche avec des marbres colorés, des sculptures, et une impressionnante chaire en bois sculpté.
L'église possède également une grande collection d'art religieux, dont des œuvres de maîtres flamands.
L'autel principal de style baroque a une grandeur et une décoration luxueuse.
Il a été conçu pour impressionner les fidèles. Il est réalisé en marbre de différentes couleurs et orné de dorures.
Le retable peint qui surmonte l'autel fait plus de cinq mètres de haut.
Alternativement sont exposés une "Élévation de la croix" de Gerard Seghers et d'un "Couronnement de la Vierge" de Cornelis Schut.
Les peintures peuvent être changées grâce à un système ancien de poulies.
Il est possible d'assister à ce spectacle trois fois par an : le lundi de Pâques, le mercredi des Cendres et pendant la Nuit des églises en août.
En ce moment, nous pouvons voir le "Couronnement de la Vierge" de Cornelis Schut.
L'autel est surmonté d'un baldaquin impressionnant, finement décoré.
Avec son assistant Antoine Van Dyck, Rubens y a réalisé une série de ses tableaux de scènes bibliques ainsi que 39 caissons du plafond.
Tous, sauf le plafond de la chapelle Maria, ont été détruits dans l'incendie de 1718.
Les tableaux quant à eux ont été pour la plupart confisqués par les autorités autrichiennes, lorsque la Compagnie de Jésus a été supprimée par le pape Clément XIV en 1773.
Certains sont dispersés dans différents musées (dont celui de Vienne).
"Le Retour de la Sainte Famille" de Rubens rachetée lors d'une vente aux enchères chez Christie’s par la ville, est revenue en 2012 dans l’église Saint-Charles-Borromée,
Après restauration, la toile a retrouvé sa place d'origine.
Dans la chapelle Notre Dame se trouve le tableau "l'Assomption de la Bienheureuse Vierge Marie", qui est une copie du tableau Peter Paul Rubens.
Bien que les œuvres originales de Rubens aient disparues, l'église abrite de nombreuses oeuvres d'artistes flamands de la période baroque.
Les confessionnaux, situés de chaque côté de la nef, sont ornés de sculptures en bois qui représentent des saints et des anges. Les expressions des visages et les drapés très fins sont superbes.
La chaire de vérité est une œuvre magistrale en bois. Elle est portée par une représentation féminine de "l’Église triomphant de l’hérésie". Les parois de la cuvette du prédicateur et son abat-voix sont décorés de 12 scènes de la vie de la Vierge Marie.
L'église possède un orgue impressionnant qui est souvent utilisé lors des messes et des concerts.
A l'étage de l'église se trouve un petit musée de la dentelle.
Ces broderies aux fuseaux sont d'une très grande finesse et témoignent du savoir faire flamand.
L'église possède une histoire insolite.
En 1991, l'organiste Frans Moors découvre dans un coin de la tribune d'orgue de l'église le manuscrit autographe de la Messe solennelle, œuvre de jeunesse d'Hector Berlioz que l'on croyait à jamais perdue.
Berlioz affirmait dans ses Mémoires qu'il avait brûlé l'essentiel de cette œuvre, dont il n'était pas content. Mais, en 1835, il avait fait don de ce manuscrit à son ami le violoniste belge Auguste Bessens. Ce manuscrit s'est retrouvé entre les mains de son frère, qui était organiste de cette église.
L'église Saint-Charles-Borromée reflète la grandeur du mouvement baroque et un monument dédié à la grandeur artistique de Rubens.
Nous partons ensuite en direction du musée Mas (Museum aan de Stroom)
Le bâtiment est un chef-d’œuvre d’architecture contemporaine, conçu par le bureau d'architectes Neutelings Riedijk inauguré le 14 mai 2011.
Il est devenu le symbole de la ville.
Son architecture s'inspire des grands édifices portuaires du 19e siècle qui étaient typiques du quartier.
Des pierres de sable en provenance d'Agra en Inde lui donnent sa couleur qui va du rouge au brun .
Il est composé de cubes empilés en hauteur, avec des fenêtres en verre qui offrent une vue panoramique sur la ville. Il est construit sous le signe de l’eau.
Il n'y a pas d'ascenseurs mais des escalators qui d'étage en étage nous font passer des salles d'expositions à la lumière des couloirs aux vitres déformantes.
Le verre ondulant, le reflet du musée dans l’eau et tout en haut l’extraordinaire panorama depuis la terrasse soulignent les liens qui relient Anvers avec le reste du monde grâce à l’Escaut.
Le Musée MAS est un musée ethnographique, anthropologique et maritime, situé au bord du bassin Bonaparte sur l'ancien port d’Anvers.
Il explore l’histoire de la ville et son histoire portuaire, ses échanges culturels et commerciaux à travers le monde et met en lumière des récits sur les échanges internationaux et les cultures du monde entier.
Au 2e étage sont stockées les 180 000 pièces de la collection de la ville d'Anvers.
Au 3e étage se tiennent les expositions temporaires.
Du 4e au 8e étage se trouvent les expositions permanentes :
Le 4e étage est consacré aux fêtes, rites et traditions à Anvers.
Au 5e étage l'exposition évoque tout le cycle de l'alimentation à Anvers au cours des âges de la production à l'élimination des déchets en passant par la nourriture.
Au 6e étage c'est l'histoire des relations entre la ville et le reste du monde avec de magnifiques maquettes de bateaux
Au 7e étage il s'agit de la Vie, de la Mort et de l'au-delà aux différentes périodes de l'histoire.
Au 8e étage se trouve une superbe collection ethnologiques.
Au dernier étage, la terrasse.
Nous visitons au 3e étage, l'exposition actuelle, "Anvers, ville en guerre 1940-1945".
Elle explore l’histoire d'Anvers pendant la Seconde Guerre mondiale en mettant en lumière la vie quotidienne, la résistance, l'occupation et la collaboration.
Le 10 mai 1940, l'Allemagne envahit la Belgique. Une semaine plus tard les nazis hissent leur drapeau sur la cathédrale d'Anvers.
Ils instaurent la dictature : suppression de la liberté de la presse, couvre-feu, travail obligatoire en Allemagne.
Les vivres manquent, petit à petit les juifs sont exclus.
De plus en plus de Belges résistent, ils sont poursuivis.
Cette exposition permet de mieux comprendre comment la guerre a profondément impacté la ville et ses habitants.
Elle rassemble des photographies, des témoignages et des documents historiques qui illustrent des aspects variés de cette période.
Des documents montrent le rôle stratégique du port d'Anvers pour les Alliés, et les conséquences de la guerre pour les civils pris au piège entre le front et les bombardements.
Le 28 août 1942, aux alentours de 23 heures un policier sonne au N°14 de la De Bertaimontstaat. Monsieur Gulden n'est pas là, il travaille comme travailleur forcé juif en France. En revanche sa femme et ses deux enfants, Dina et Mozez Aron, sont là. Ils sont emmené et assassinés peu après à Auschwitz.
Le 4e étage est consacré aux fêtes, rites et traditions à travers le monde avec une exploration dont les différentes cultures marquent les moments importants de la vie comme les naissances, les mariages, les funérailles, les célébrations saisonnières et religieuses.
Pour cela le musée utilise des installations interactives pour montrer comment ces rituels et fêtes symbolisent l'identité, la communauté et le passage du temps.
Au 5e étage l'exposition « Le cycle de l'alimentation » évoque tout le cycle de l'alimentation à Anvers au cours des âges, de la production à l'élimination des déchets en passant par la nourriture.
Cette exposition met en avant des pratiques locales, des aspects historiques, et des innovations modernes.
Le transport a profondément évolué au fil des siècles, en modifiant la relation qu'ont les citadins avec la nourriture.
Au Moyen Âge, Anvers renfermait entre ses murs de nombreux jardins et des étables, qui permettaient de se nourrir.
Au XVIe siècle, l'agriculture urbaine décline. Grâce à sa situation sur l'Escaut et aux grandes voies de communications, les aliments arrivent à Anvers par bateaux à voile.
Au XIXe siècle, avec l'industrialisation les bateaux à voile sont remplacés par des bateaux à vapeur, des camions frigorifiques, des containeurs, qui acheminent plus rapidement les aliments qui viennent de plus en plus loin.
Aujourd'hui les populations se rendent compte des effets néfastes du transport alimentaire pour l'environnement...
L’exposition parcours les thèmes de la production et la distribution alimentaire, on y voit comment les produits sont cultivés, pêchés ou fabriqués, puis distribués.
Elle traite aussi du commerce et des marchés, une partie est consacrée aux échanges commerciaux d'Anvers, en lien avec son statut de port international.
L'exposition se poursuit avec la consommation et les traditions culinaires avec la présentation de plats traditionnels et l’évolution des habitudes alimentaires des Anversois au fil du temps.
Pour terminer, le musée sensibilise au problème du gaspillage alimentaire, des enjeux environnementaux et de l’importance de la réduction des déchets alimentaires.
Des photographies, et des installations interactives montrent aux visiteurs le cycle complet de l’alimentation à Anvers et l'impact de ce cycle sur la vie des habitants et sur l'environnement, de ce fait il est difficile de rendre compte de cette exposition en images.
Au XVIe siècle des peintures sur les mois et les saisons devenaient populaires. Elles reflétaient comment les citadins se représentaient la campagne.
Un boucher se rend à un marché à bestiaux(printemps) et abattage d'un cochon (hiver) de Sébastien Vrancx_Anvers_1600-1610_huile sur panneaux_The Poebus Fondation
Abel Grimmer et son père comptent parmi les premiers peintres paysagers aux Pays Bas. Sur ce tableau on aperçoit au loin les remparts de la ville. Un paysage rural idyllique occupe un endroit idéal pour faire paître les animaux. Les canaux permettaient aux anguilles de nager jusqu'aux maisons anguillières où elles étaient attrapées pour être ensuite vendues.
Able Grimmer_Anvers _1604_Peinture à l'huile sur panneau
Cette peinture montre un marché au poisson au XVIIe siècle, à l'intérieur de l'enceinte. Les poissonniers vendaient du poisson de mer. Les femmes qui n'appartenaient pas à cette guilde pouvaient vendre des moules ou des huitres à côté des étals officiels du marché.
Le Marché aux poissons à Anvers_Hendrik Van Minderhout_Anvers_1695_Peinture à l'huile sur toile
Au 6e étage, l'exposition explore l'histoire des relations internationales de la ville à travers les siècles.
Elle met en lumière les échanges historiques de la ville avec le reste du monde, depuis ses premières connexions maritimes jusqu’à son rôle actuel sur la scène mondiale.
À travers des maquettes de bateaux, des reproductions de bâtiments, des tableaux et des cartes, l'exposition raconte comment Anvers a interagi avec des civilisations lointaines.
La conquête de l'Afrique centrale commence en 1870. En 1885, le roi belge, Leopold II devient le chef d'Etat du Congo. Il fait régner la terreur dans ce pays.
Des millions de Congolais meurent de l'exploitation, de la faim, de la maladie, de la violence.
Le Congo proclame son indépendance en 1960.
L'ère coloniale s'est révélée profitable pour la Belgique. Dès 1900, les bateaux arrivent chargés d'ivoire, d'huile de palme, de caoutchouc, d'oeuvres d'art et d'objets du quotidien.
L’attraction incontournable du Mas est son toit panoramique, qui offre une vue à 360° sur la ville d’Anvers, le port, et l’Escaut.
On peut voir :
- Le port d'Anvers, l’un des plus importants d’Europe, avec ses quais, ses grues et son activité maritime.
- La vieille ville avec ses bâtiments historiques, comme la cathédrale Notre-Dame et les façades typiques des maisons flamandes et les nouveaux quartiers modernes.
La visite au MAS a été une excellente manière de découvrir l’histoire d’Anvers tout en ayant un aperçu sur les échanges culturels et maritimes qui ont façonné la ville.
Bel après-midi avec la visite de l’église Saint-Charles-Borromée qui est un lieu incontournable pour son art baroque, les tableaux de Rubens et pour les tableaux mobiles au dessus de l'autel qui étaient changés de manière automatisée, ce qui était complètement novateur pour l'époque.
Le musée Mas, situé à proximité du port est aussi une belle découverte. Il est un des musées les plus emblématiques d'Anvers, un lieu d'échanges culturels, qui met en lumière l'histoire et l'identité d'Anvers dans un cadre moderne.
Texte de Paulette Gleyze
Photos de Anne, Paulette et Gérard Gleyze