mardi 4 février 2025

Séjour à Paris_visite exposition "Les Surréalistes"_22/11/2024


Le 22 novembre 2024 nous visitons au Centre Pompidou à Paris, l'exposition exceptionnelle intitulée «Surréalisme. L'exposition du centenaire (1924-1969)» qui s'est tenue du 4 septembre 2024 au 13 janvier 2025.

Elle a été organisée par Didier Ottinger, conservateur général et directeur adjoint du Musée national d'art moderne, et Marie Sarré, conservatrice au Centre Pompidou.
Vue sur Paris depuis le Centre Pompidou

Le mouvement surréalisme a été fondé par André Breton dans les années 1920 et a marqué profondément l’art du XXème siècle. 
André Breton

Il a été créé avec la publication du "Manifeste du surréalisme" en 1924, où Breton définit le surréalisme comme une exploration de l'inconscient à travers l'automatisme, les rêves et le hasard.
André Breton (1896-1966)Trajectoire du rêve, GLM, 1938_Centre Pompidou, Paris_Bibliothèque Kandinsky

Ce mouvement artistique et littéraire a été influencé par Sigmund Freud et la psychanalyse, ainsi que par le dadaïsme. 
Sigmund Freud(1856-1939)_Le rêve et son interprétation_collection particulière

Parmi les figures majeures du surréalisme, on trouve Philippe Soupault, René Magritte, Max Ernst, Paul Éluard, Louis Aragon, Robert Desnos, Man Ray, Joan Miró, Salvador Dalí, et bien d’autres encore.

Pour célébrer les 100 ans du surréalisme, le Centre Pompidou accueille une exposition de grande envergure qui retrace plus de 40 ans de ce mouvement d’une incroyable effervescence créative, et présente plus de 500 œuvres de divers artistes emblématiques du mouvement.

Le parcours est composé de 14 parties thématiques qui explorent des sujets tels que le rêve, l'inconscient, l'érotisme, les créatures hybrides et les forces spirituelles.

Une pièce maîtresse de l'exposition est le "Manifeste du surréalisme" d'André Breton, un document fondateur du mouvement, exceptionnellement prêté par la Bibliothèque nationale de France pour cette occasion.

L'exposition met aussi en lumière des artistes féminines comme Meret Oppenheim, Claude Cahun et Leonora Carrington, et souligne la diversité et l'influence mondiale du surréalisme.

C’est en 1924, date de la publication du "Manifeste du surréalisme" par André Breton, que le mouvement surréaliste est né officiellement.

 Autour de ce premier Manifeste se sont ressemblé de nombreux artistes attirés par ce nouveau courant artistique prônant « l’imagination au pouvoir » et la liberté totale en terme de création.

L'exposition de 2024 est conçue comme un labyrinthe dont le centre est le Manifeste de Breton.

L'exposition de 1947 était organisée par Marcel Duchamp en forme de labyrinthe.
Le labyrinthe est le lieu des contradictions, ses murs renferment un secret, ils hébergent le minotaure, être double, mi homme mi taureau. 

Au sein du labyrinthe "la vie et la mort, le réel et l'imaginaire, le passé et le futur, le communicable et le non communicable, le haut et le bas cessent d'être perçus contradictoirement" André Breton.

Le Labyrinthe est devenu l'emblème du surréalisme de 1924 jusqu'à sa dissolution dans la fin des années 1960.

On accède à l'exposition par une spectaculaire porte à tête-de-mort inspirée de l’un des trois cabarets parisiens des années 20.


Le manuscrit original du "Manifeste" d’André Breton prêté exceptionnellement par la Bibliothèque Nationale de France, est exposé dans un « tambour » central au cœur de la Galerie.
L’exposition rayonne tout autour.
Ce document, est mis en valeur avec d’autres photos et papiers de l’époque.

Tout autour, dans cette même salle se trouve une projection immersive où l’on peut entendre la voix de Breton recréée pour l’occasion par l'IA.

Une projection multimédia accompagne la découverte de ce document unique.







André Breton_Autoportait dans un photomaton_Vers 1929_Centre Pompidou

Salvator Dali_Autoportait dans un photomaton_Vers 1929_Centre Pompidou

Autoportait dans un photomaton_Vers 1929_Centre Pompidou

Jean Aurenche, Marie_Berthe Aurenche, Max Ernst_Autoportait dans un photomaton_Vers 1929_Centre Pompidou




 Le mouvement surréaliste témoigne de son intérêt pour l’inconscient, l’irrationnel et les états modifiés de conscience, c'est "L’entrée des médiums".

Les surréalistes cherchent à explorer l’inconscient influencés par Freud et par l’automatisme psychique.

Ils s’intéressent aussi aux expériences paranormales, à l’occultisme et au spiritisme avec pour idée que l’accès à des réalités invisibles pourrait nourrir leur quête de l’imaginaire absolu.

Dans les années 1920, ils mènent des expériences sur l’écriture automatique. 

Breton et ses amis organisent des séances où certaines personnes tombent en transe et délivrent des messages étranges. Robert Desnos, était connu pour entrer dans des états de transe hypnotique et produire des récits automatiques hallucinants.

Certains surréalistes, comme René Crevel, s’intéressent particulièrement à l’ésotérisme et au spiritisme. Crevel, qui souffrait de troubles psychologiques, trouvait dans ces pratiques un moyen d’explorer son inconscient.

D’autres, comme Victor Brauner, intègrent des références mystiques et occultes dans leur art.

Malgré cet intérêt, André Breton a fini par prendre ses distances avec les médiums et le spiritisme, préférant une approche plus proche de la psychanalyse. 

"Le surréalisme fait du poète un voyant capable de faire résonner son âme au diapason de l'univers et de retrouver l'accord antique de la poésie et de la divination".

Giorgio Chirico peint en 1914 un portrait de Guillaume Apollinaire marqué d'une cible à l'endroit où le poète sera blessé 2 ans plus tard par un éclat d'obus.

En 1919, André Breton et Philippe Soupault applique la plongée dans l'inconscient à l'écriture automatique des "Champs Magnétiques" écrit à quatre mains.

En novembre 1922, dans l'article "Entrée des Médiums" que publie André Breton dans la revue "Littérature", rend compte du sommeil hypnoptique auxquels se livrent les surréalistes.

Dès 1925, cette pratique se trouve dans les frottages de Max Ernst ou les peintures d'André Masson.

Le chilien Roberto Matta fait la connaissance des surréalistes en 1937.
André Breton remarque cette figure nue qui pointe son revolver vers le spectateur qui pour lui symbolise la poétique révolutionnaire du surréalisme.
Matta (1911-2002)_Le pète (un poète de notre connaissance)_1945_Huile sur toile_Centre Pompidou_Achat grâce au mécénat de Tider,2016

Victor Brauner (1903-1986)_Le surréaliste, 1er janvier 1947_Huile sur toile_Peggy Guggenheim collection, Venise

Edith Rimmington (1902-1986)_Museum 1951_Plume, encre, gouache et aquarelle sur papier

André Breton fait la connaissance d'Hector Hyppolite, lors d'un voyage à Haïti. C'est un peintre, prêtre vaudou et fondateur des artistes naïfs d'Haïti. 

André Breton acquiert ce tableau qui représente Ogou, patron des forgerons dans le culte vaudou.
C'est aussi un personnage essentiel dans le tarot de Marseille.
Hector Hyppolite (1894-1948)_Ogou Ferraille, vers 1947_Huile sur masonite_Courtesy of the Museum of Everything

Arrivé à Paris en 1911, Giorgio Chirico se rapproche du groupe d'artistes formé autour de Guillaume Apollinaire.

En 1914, il réalise le portrait de l'écrivain avec les attributs d'Orphée, poète et musicien de la mythologie grecque.

Les lunettes évoquent la "voyance" du regard poétique, c'est à dire sa capacité à percevoir le monde au delà de ses apparences concrètes.

A l'arrière plan, la silhouette de Guillaume Apollinaire est marquée par une marque blanche qui correspond précisément à l'emplacement où il sera frappé par un éclat d'obus deux ans plus tard.

Ce pouvoir de prémonition fascine les surréalistes.

Cette oeuvre de Chirico montre un personnage les yeux clos. Il devient pour les surréalistes le symbole du monde intérieur.

 En 1916, André Breton descend d'un autobus en marche, attiré par ce tableau accroché dans une vitrine. 

Quelques années plus tard, Breton raconte avoir répété involontairement le même geste, cette fois en descendant précipitamment d’une voiture en marche pour revoir ce tableau. 

Ce phénomène, où un événement se reproduit avec une intensité troublante, s’accorde avec la logique que les surréalistes appellent le "Hasard objectif".
Giorgio de Chirico (1888-1978)_Portrait prémonitoire de Guillaume Apollinaire, printemps 1914_Huile sur toile_Centre Pompidou, Paris_Achat 1975

Giorgio de Chirico (1888-1978)_Le cerveau de l'enfant,1914_Huile sur toile_Modern Museet, Stockholm purchase,1964

En 1931, lors d'un séjour à Paris, Brauner peint ce tableau d'un homme à l'œil énucléé.

Sept ans plus tard, alors qu'il s'interpose entre les artistes Oscar Dominguez et Esteban Francès, le peintre perd l'usage de son œil.

Cette prémonition vaut à Brauner d'entrer dans l'histoire du "hasard objectif" des surréalistes.

Dans le revue "Minotaure", l'écrivain Pierre Mabille parle de "l'oeuvre messagère de l'inconscient, annonciatrice de l'avenir personnel et social"
Victor Brauner (1903-1966)_Autoportrait, 1931_ Huile sur toile_Centre Pompidou, Paris_Leg de Madame Jacqueline Victor Brauner, 1986

Marcel Jean (1900-1993)_Le spectre de Gardénia, 1936/1972_Flocage sur plâtre, fermeture éclair, pellicule de film et daim_Centre Pompidou, Paris_Achat, 2009

Dans le "Manifeste du Surréalisme", André Breton définit l'écriture automatique "comme la voie d'accès privilégiée à l'inconscient."

Max Ernst fait naître des images en frottant sur un papier posé sur un vieux parquet.

 Il transpose ce principe à la peinture en mettant au point une technique de grattage, consistant à révéler la présence d'objets disposés sous une toile peinte.

Ce principe trouve écho chez André Masson dans ses peintures de sable. 
Max Ernst (1891-1976))_L'armée céleste, vers 1925-1926_Huile sur toile_Musées royaux des Beaux Arts de Belgique, Bruxelles_Acquis par M Jacques Bolle, Bruxelles, 1965

Marcel jean (1900-1993)_Décalcomanie, 1936_Décalcomanie sur papier_Centre Pompidou Paris_Achat, 1981

Le mouvement surréaliste, revendique une exploration du rêve comme moyen de libérer l'esprit des contraintes rationnelles et sociales.

Inspirés par la psychanalyse de Sigmund Freud, ils considèrent que le rêve n'est pas un simple sujet d'inspiration mais une expression directe de l’inconscient.

Breton écrit : « Le rêve et la réalité finissent par se confondre en une sorte de réalité absolue, une surréalité. »

Lorsqu'il est étudiant en médecine, André breton se passionne pour l'ouvrage d'Albert maury, "Le sommeil et ses rêves" (1861) qui pose les prémisses de l'étude neurologique du rêve.

En 1916, il découvre les méthodes d'interprétation des rêves de malades neuro- psychiatriques au centre neuropsychiatrique de Saint Dizier à des fins curatives préconisées par Sigmund Freud.

Les surréalistes transposent la psychanalyse à la poésie et publient leurs "récits de rêve" en reproduisant les images qui viennent à l'esprit à la lisière du sommeil.
André Masson (
1896-1987)_Dans la tour du sommeil, 1938_Huile sur toile_Baltimore Missouri of art 

Joan Miro (1893-1983)_La sieste, Juillet, septembre 1925_uile sur toile_Centre Pompidou, Paris_Achat 1977

Salvator Dali (1904-1989)_Rêve causé par le vol d'une abeille autour d'une pomme-grenade, une seconde avant l'éveil, 1944_Huile sur bois_Musée national Thyssen Bornemisza, Madrid


Salvator Dali (1904-1989)_Le Rêve, 1931_Huile sur toile_The cleveland museum of art John L Severance Fund, 2001

Eileen Agar (1899-1991)_Angel of Anarchy, 1936-1940_Plâtre, tissu, coquillages, perles, pierres diamantées et autres matériaux_Tate Gallery

Dora Maar se rapproche des surréalistes vers 1933.

Les photomontages qu'elle réalise traduisent l'érotisme, le sommeil, l'œil, l'univers maritime, l'inconscient, l'irrationnel.

Ses compositions respectent la perspective en donnant l'illusion de vision surréalistes.
Dora Maar (1907-1997)_Sans titre (main coquillage), 1934_Epreuve gélatino argentique_Centre Pompidou, Paris_Achat 1981

Héritier de Dada, Georges Hugnet réalise des collages pleins de fantaisie et d'humour à partir de photographies de Jean Moral qu'il découpe dans des magasines de charme.

Les surréalistes sont fascinés par les images de la culture de masse qu'ils réinvestissent.

Breton les définissaient comme "l'accouplement de deux réalités en apparence inaccoupables sur un plan qui en apparence ne leur convient pas".
Georges Hugnet (1906-1974)_sans titre, 1935_Elements photomécaniques découpés et collés_Centre Pompidou, Paris_Achat grâce au mécénat de Yves Rocher, 2011_Ancienne collection Christian Bouqueret

Grâce Stern (1904-1999)_Sueno N° 17_1949_Epreuve gélatino argentique_Musée Nacional Centre de Arte Reina Sofia, Madrid

Musicienne, danseuse, costumière des ballets russes et peintre, Valentine Gross épouse Jean Hugo, arrière petit-fils de Victor Hugo.

En 1926, elle rejoint les surréalistes, dont elle réalise plusieurs portraits.
Valentine Hugo (1887-1968)_Rêve du 21 septembre 1929_Mine de plomb sur papier_Collection Mony Vibescu

Dora Maar 
(1907-1997)_Monstre sur la plage_épreuve gélatino argentique_Musée Centre Pompidou, Paris_Achat grâce au mécénat de Yves Rocher, 2011

Les images du parapluie et de la machine à coudre sont devenues des symboles surréalistes grâce à une phrase culte issue de "Les Chants de Maldoror" (1869) de Lautréamont : "Beau comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d’une machine à coudre et d’un parapluie."

Sous l’impulsion d’André Breton, les surréalistes voient dans cette rencontre d’objets hétéroclites un exemple du hasard objectif. 

Ce hasard n’est pas totalement aléatoire, il révèle des correspondances cachées entre des éléments a priori incompatibles, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives de sens et de beauté.

Le choc entre le parapluie, objet du quotidien, et la machine à coudre, symbole du travail mécanique, dans un contexte aussi inattendu qu’une table de dissection, provoque une rupture avec la logique rationnelle. 

C’est précisément cette rupture qui fascine les surréalistes.

En 1914, dans la revue "Vers et Prose", parait le texte de Isidore Ducasse alias le Comte de Lautréamont "Les chants de Maldoror". 
Comte de Lautréamont (1846-1870)_Les chants de Maldoror, 1920_Edition de la Sirène, 1920_BNF, Paris

Comte de Lautréamont (1846-1870)_Œuvres complètes, Au sans Pareil, 1924_Centre Pompidou, Paris_Bibliothèque Kandinsky

Comte de Lautréamont (1846-1870)_Œuvres complètes, José Corti, 1938_Centre Pompidou, Paris_Bibliothèque Kandinsky

Ce texte appelle à la violence et à la destruction.

Pour les surréalistes "il est un défi à toute construction logique et répond à la faillite du monde qui les a conduits à la boucherie et dans les tranchées."

Le manifeste "La Révolution d'abord et toujours" publié en 1925 a été rédigé entre autres par André Breton, Paul Éluard, Benjamin Péret, Pierre Naville

Par ce manifeste, les surréalistes affirment leur engagement révolutionnaire, leur rapprochement avec le communisme, leur opposition radicale au colonialisme et la propagande patriotique qui justifie la guerre .

Ils s’opposent aux valeurs bourgeoises et aux institutions traditionnelles.

Le texte proclame que la révolution est nécessaire, non seulement politique, mais aussi artistique et philosophique, et que le surréalisme doit devenir un levier pour transformer le monde.

Ce manifeste marque un tournant où le surréalisme ne se limite plus à un mouvement artistique, mais devient un engagement total contre l'ordre établi.

Il illustre bien l’ambition du surréalisme de transformer non seulement l'art, mais aussi la société dans son ensemble.
"La Révolution d'abord et toujours, 1925_Tract_Collection David et Marcel Fleiss Galerie_1900-2000, Paris

Konald Klapheck découvre le surréalisme à l'occasion d'un séjour à Paris, au milieu des années 1950.

A l'instar de Marcel Duchamp il retient l'attention portée aux objets quotidiens et à leur charge poétique, et de Magritte, il retient la facture lisse et impersonnelle.

Les surréalistes lui accordent un accueil enthousiaste, en particulier André Breton qui préface le catalogue de l'exposition de l'artiste en 1965 et lui consacre un article dans "Le surréalisme et la peinture" de 1964.
Konald Klapheck (1935-2023)_Die Gekränkte Braut, 1957_Huile sur toile_Collection Klapheck

Wolfgang Paalen (1905-1959)_Nuage articulé, 1937/2023_éponges naturelles, tissu, métal, bois_Collection particulière Berlin

Au printemps 1929, Max Ernst collecte des illustrations de revues du 19e siècle, qui suscitent chez lui un état de "grande excitation visuelle". Il réalise environ 150 collages en 15 jours.

La femme 100 têtes remet en question la forme romanesque.
Il multiplie la polysémie du titre : la femme 100 têtes, la femme sans tête, la femme sang tête, la femme s'entête... et redouble d'incohérence.

Il développe aussi les grands thèmes surréalistes : l'anticléricalisme, l'érotisme, le rêve, la folie.
Max Ernst (1891-1976)_La femme 100 têtes,1929_Gravures découpées et collées sur papier collé sur carton_Centre Pompidou, Paris_Don de M Carlo Perrone, 1999





Max Ernst_Série de Gravures découpées et collées sur papier collé sur carton

René Magritte adopte la pratique du collage mais en 1936 il l'a remet en question : "Une nuit, je m'éveillais dans une chambre où l'on avait placé une cage et son oiseau endormi. Une magnifique erreur me fit voir dans la cage l'oiseau disparu et remplacé par un œuf. Je tenais là un nouveau secret poétique étonnant; le choc que je ressenti était provoqué précisément par l'affinité de deux objets alors que précédemment ce choc était provoqué par la rencontre d'objets étrangers entre eux."

Dès lors, les associations sont dictées par la dialectique comme une cheminée et une locomotive, liés par la fumée.
René Magritte (1898-1967)_La durée poignardée, 1938_Huile sur toile_The Art Institute of Chicago

Salvator Dali 
(1904-1989)_Le téléphone aphrodisiaque, 1938_Plastic, métal_Ménéapolis Institute of Art

Man Ray (1890-1976)_Hommage à Lautréamont, 1931-1932_Epreuve gélatino argentique_Birger Raben-Skov, Copenhague

Pierre Roy (1890-1950)_Huile sur toile_Centre Pompidou, Paris_Achat par l'Etat, 1947

Présenté à "l'exposition surréaliste" à la galerie Pierre Colle en 1933, ce plâtre est une étude pour une table imaginée pour la villa moderniste de Charles et Marie-Laure de Noailles à Hyères.

Alberto Giacometti (1901-1966)_Table, 1933_Centre Pompidou, Paris_Don du Vicomte Charles de Noailles, 1951

Rapprochant le moulage d'une tête d'Apollon antique et un gant de caoutchouc, le "Chant d'Amour" porte au plus haut l'accomplissement de la définition de la beauté selon Lautréamont.

René Magritte écrit "Quand j'ai vu pour la première fois la reproduction du "Chant d'amour" de Chirico, ce fut un des moments les plus émouvants de ma vie : "mes yeux ont vu la pensée pour la première fois"

Giorgio de Chirico (1888_1978)_Le chant d'amour, 1914_Huile sur toile_The Museum of Modern Art, New York


La Chimère chez les surréalistes est une figure récurrente qui symbolise à la fois le rêve, le désir, la métamorphose et l’inconscient. Inspirée de la mythologie, où elle est un monstre hybride (lion, chèvre, serpent), la chimère devient, dans l’univers surréaliste, une image du merveilleux et de l’irrationnel.

Dans l'Iliade, Homère décrit la Chimère : "Lion par devant, serpent par derrière, chèvre au milieu".

Cet animal légendaire, figure centrale qui incarne l'irrationnel, le merveilleux et la subversion du réel, exerce une grande fascination chez les surréalistes.

Elle devient pour eux le symbole du désir, du rêve, de la transformation perpétuelle, la déstabilisation des repères rationnels et l'exploration du rêve et de l’inconscient.

Le surréalisme voit dans la chimère une figure du désir, une manifestation des pulsions cachées et du merveilleux caché sous la réalité quotidienne.

Friedrich Schröder-Sonnesntern est un créateur d'art brut allemand. Accusé de vagabondage et d'escroquerie, il est interné en 1912 dans un hôpital psychiatrique à Neustadt en Allemagne où il commence à dessiner.

Libéré, il développe un univers fantastique empli de créatures chimériques, mi- humaines, mi- animales dont le style est une ironie envers la société.
Ses scènes souvent grivoises attirent l'attention des surréalistes qui exposent son oeuvre dans plusieurs manifestations.
Friedrich Schröder-Sonnesntern (1892-1982)_Der Zauberficch, 1954_Centre Pompidou, Paris

Max Walter Svanberg (1912-1994)_Himlens Ljusbla okidé och Stärnans tiohöbdade atra, 1969_aquarelle et gouache sur papier_collection Bo Alveryd

En 1942, Dorothea Tanning fait la connaissance des surréalistes grâce à son ami galeriste Julien Levy. Quelques semaines plus tard, en signe d'adhésion au mouvement, elle peint Birthday qui adopte l'iconographie fantastique.

L'artiste se représente à demi-nue, vêtue d'une veste en racines. A ses pieds une créature chimérique qui symbolise la coexistence du rêve et de la réalité.

Dorothea Tanning (1910-2012)_Birthday, 1942_Huile sur toile_Philadelphie of art

En 1938, l'artiste Victor Brauner quitte Bucarest pour Paris.

Les troubles ambiants de l'époque, les difficultés liées à l'exil et le souvenir du folklore roumain favorisent une iconographie fantastique, hantée par créatures hybrides.

Le motif du loup-garou imaginé en 1933, apparaît plusieurs fois dans ses peintures.

En 1947, à l'occasion de l'exposition à la galerie Maeght Brauner créé cet animal en trois dimensions en fixant la gueule et la queue empaillés sur une table dont l'un des pieds semble s'être métamorphosé.

Victor Brauner (1903-1966)_Loup-table, 1939-1947_Bois et éléments de renard naturalisé_Centre Pompidou, Paris_Don de Mme Jacqueline Brauner en 1974.

Kurt Seligmann et son épouse Arlette Paraf sont les premiers surréalistes à atteindre New York après la déclaration de guerre. L'artiste a adhéré au mouvement en 1934. 

Il continue à New York des compositions complexes où évoluent des figures chimériques.
En 1948, Kurt Seligmann publie un ouvrage d'ésotérisme, "Le Miroir de la Magie"
Kurt Seligmann (1900-1962)_Magnetic mountain, 1948_Huile sur toile_The Art Institute of Chicago

Suzanne Van Damme (1901-1986)_couple d'oiseaux anthropomorphes, 1944_Huile sur toile_RAW (Rediscovering Art by Women)

Max Ernst (1891-1976)_Chimère, 1928_Huile sur toile_Centre Pompidou, Paris_Achat en 1983

Pour répondre à l'appel de Lautréamont "une poésie faite par tous, non par un", les surréalistes (Marcel Duhamel, Jacques Prévert, Yves Tanguy, Georges Sadoul) inventent en 1925, le jeu du "cadavre exquis"

A tour de rôle, chaque participant écrit un nom, un adjectif, un verbe et un complément en ignorant les participations précédentes ou prolonge une image dont il devine quelques traits.

Il doit son nom au premier jeu qui commençait par "Le cadavre-exquis_boira_le vin-nouvau."

Le jeu va s'appliquer aussi à l'image jusqu'à la fin des années 1960.

Exercice collectif, "le cadavre exquis" déconstruit la notion de génie individuel et exauce le vœu de Lautréamont, "La poésie doit être faite par tous, non par un".

En 1948, l'exposition, "le cadavre exquis, son exaltation" organisée à la galerie Nina Dausset à Paris rassemble plusieurs de ces créatures "inimaginables par un seul cerveau" (Simone Breton)

Chimère, fille de Gaïa, qui n'a ni lois ni raisons va s'impose comme l'animal totémique es surréalistes.
Yves Tanguy, Marcel Duhamel, Max Morise, André Breton_Cadavre exquis,_8 avril 19288_Ccrayons de couleurs sur papier_Collection privée

André breton, Marcel Duhamel, Max Morise, Yves Tanguy_Cadavre exquis, 1928_Crayon sur papier _Collection particulière

André breton, Yves Tanguy, Man Ray, Max Morise_Cadavre exquis, 1928_Crayon sur papier _Collection particulière

André breton, Elisa Breton, Benjamin Péret_Cadavre exquis, frottage, 19 mars 1949_Mine de plomb sur pier_Collection Anthony, JP Meyer, Paris

Victor Brauner, André Breton Oscar Dominguez, Wilfredo Lam, anonyme, Jacques Hérold, Jacqueline Lamva_Dessin collectif, 1940-1941_Encre et crayon de couleur sur papier_Musée Cantini, Marseille_Don de Mesdames Aube Elléouët Breton et Oona Elléouët en 2008 en hommage à Varian Fry

André Breton, Jacques Hérold, Wilfredo Lam_Cadavre exquis, 1940_Musée Pompidou, Paris

"Alice au pays des merveilles" de Lewis Carroll a eu une influence importante sur le mouvement surréaliste, qui voyait en elle le parfait exemple de l’exploration de l’absurde, du rêve et de la logique illogique.

Le monde onirique d’Alice où les lois de la réalité sont bouleversées correspond pour les surréalistes aux concepts freudiens et aux explorations du subconscient.

Des artistes comme Salvador Dalí, Max Ernst, René Magritte et bien d’autres se sont inspirés de l’univers d’Alice, antérieur d’un demi siècle au mouvement surréaliste.

Alice pourrait être vue comme une figure pré-surréaliste, errant dans un monde où la logique est renversée et où le rêve devient plus réel que la réalité.

En 1946, Magritte considère le surréalisme muré dans le pessimisme. Pour contrecarrer cela il rédige "Le Manifeste du surréalisme en plein soleil".

Il dit, "Contre le pessimisme général, j'oppose la recherche de la joie, du plaisir. j'entends par là, tout l'attirail traditionnel des choses charmantes, les oiseaux, les arbres, l'atmosphère du bonheur qui remplace maintenant mes tableaux la poésie inquiétante que je m'étais évertué jadis à atteindre".

La réponse de Breton ne se fait pas attendre "Texte antidialectique et par ailleurs cousu de fil blanc, vous plaisantez".

René Magritte (1898-1967)_Alice au pays des merveilles, 1946_Huile sur toile_Banque CPH

Clovis Trouille (1889-1975)_Le rêve d'Alice (dans un fauteuil), 1945_Huile sur toile_Indivision Lambert

Marcel jean (1900-1993)_Armoire surréaliste, 1941_Bois verni, quatorze portes ornées de peinture surréaliste_musée des arts décoratifs, Paris_Legs Marcel Jean, 1994

Héritière de Lewis Caroll, Leonora Carrington retient l'univers merveilleux, peuplé d'un bestiaire fantastique, de hyènes, de chiens, de juments...

L'artiste se représente debout, vêtue d'une camisole de force. Il s'agit d'un souvenir douloureux à la clinique psychiatrique où l'a menée une dépression.
Leonora Carrington (1917-2011)_Green Tea, 1942_Huile sur toile_MoMa New York

René Magritte (1898-1967)_Les valeurs personnelles, 1952__Huile sur toile_San Francisco Museum of Modern Art

Dorothea Tanning (1910-2012)_Eine Kleine Nachtmusik,1943_Huile sur toile_Tate Gallery

Mimi Parent et son mari Jean Benoît rencontrent André Breton en 1959, à l'occasion d'une visite d'atelier organisée par Aube Elléouët-Breton.

Quelques mois plus tard, ils participent à l'exposition "EROS, VIII. Exposition inteRnatiOnale du Surréalisme" à la galerie Cordier.

Hommage à l'enfance, à Alice. Les nattes blondes apparaissent de nombreuses fois dans l'oeuvre de Mimi Parent.
Mimi Parent (1924-2005)_Comptine pour une enfant perverse ou children'corner, 1969_Boîte en bois peinte à l'huile. Feuilles mortes, cartes à jouer, coquilles, plastique,fil_Margarita ruger-Carnacho

Ce tableau sert de critique à la condition féminine. La mère est réduite au rôle de domestique, la jeune fille blondes semble implorer de l'aide et le père est démesurément grand.

Tanning expliquait qu'il s'agissait pour elle de condamner la hiérarchie imposée dans la famille.
Dorothea Tanning (1910-2012)_Portrait of a Family, 1954_Guile sur toile_Centre Pompidou, Paris_Achat de l'Etat en 1974


Simon Hantaï (1922-2008)_Femelle-Miroir II, 1953_Huile sur toile, miroir, ossements_Centre Pompidou, Paris_Don de M Maurice Gorelli, 1990

Les surréalistes ont souvent utilisé des figures monstrueuses pour symboliser et critiquer les régimes totalitaires,  les Monstres politiques.

Ces "monstres politiques" reflètent les inquiétudes des surréalistes face à la montée du fascisme et d'autres formes d'oppression.

Un an avant l'arrivée d'Adolf Hitler au pouvoir en Allemagne, le mouvement a adopté une nouvelle revue intitulée "Le Minotaure", utilisant cette figure mythologique comme emblème pour représenter les dangers du totalitarisme.

Pendant la 2ème guerre mondiale Tatsuo Ikeda est enrôlé dans la marine impériale japonaise . L'expérience de la guerre, la disparition de certains de ses amis, et le Japon dévasté l'affectent durablement.

Les essais nucléaires des Américains au milieu des années 1950 lui inspirent sa vision satirique de la série "Genealogy of Monsters, an Album of Birds and Beasts " qui rassemble des créatures mutilées, victimes de déformations et de tortures infligées par des engins mécaniques.
Tatsuo Ikeda (1928-2020)_Family, from Chronicle of Birds and Beasts (Kinjuli), vers 1966_Plume et encre noire avec aquarelle et gouache sur papier vélin crème_The Art Institute of Chicago

Jacques Hérold (1912-1987)_Les têtes, 1939_Huile sur toile_Centre National des Arts Plastiques_Achat à l'artiste en 1975, en dépôt au musée Cantini, Marseille

Gérald Vulliamy, gendre du poète Paul Eluard, retient du surréalisme "L'automatisme des formes et des mouvements". 

"Le Cheval de Troie" est une oeuvre hallucinatoire influencé par Jérôme Bosch.
Cette oeuvre visionnaire est présentée à la galerie Jeanne Bucher, à Paris, en 1943, bravant la censure de Vichy.
Gérald Vulliamy (1909-2005)_Le Cheval de Troie, 1936-1937_Huile sur panneau_Collection particulière

Max Ernst peint "L'Ange du foyer" dans une Europe en proie aux soulèvements fasciste, franquiste et nazi.

 Cette montée de la terreur s'incarne dans cette créature monstrueuse. 
En septembre 1939, arrêté comme "étranger ennemi" auteur d'une peinture dite "dégénérée" Ernst est interné au camps des Milles, près d'Aix en Provence.

Il s'évade et réussi à rejoindre New York en 1941.
Max Ernst (1891-176)_L'Ange du foyer (Le triomphe du surréalisme), 1937_Huile sur toile_Collection particulière

André Masson (1896-1987)_De pie en pie, 1939_Encre sur papier_Collection particulière

Dali choisit de restituer la guerre civile espagnole comme un aspect biologique. 
Il superpose son histoire personnelle à l'histoire de l'Espagne, la figure du cannibale étant liée à celle du père cruel.

L'absence de position claire de Dali au sujet de la guerre et son admiration ambiguë au régime de Franco lui valu d'être exclu du groupe surréaliste dès 1934.
Salvator Dali (1904-1983)_Construction molle avec haricots bouillis (prémonition de a guerre civile), 1936_Huile sur toile_Philadelphie Museum of Art

René Magritte (1898-1967)_Le Présent_Gouache sur papier_Collection particulière
Leonora Carrington (1917-2011)_Ulu's Pants, 1952_Huile  et tempera sur masonite_Collection particulière

Victor Brauner inflige à Hitler des blessures irréparables. 
Il lui crève les yeux, lui cloue la bouche, empale son visage avec un parapluie.
Victor Brauner (1903-1966)_Hitler, 1934_Huile sur carton_Centre Pompidou, Paris_Don de Mme Aube Elléouët-Breton, 2003

André Masson (1896-1987)_Portrait charge de Franco, vers 1938-1939_Plume et encre de chine sur papier vergé_Musée d'Art Moderne_
Don de Mme Aube Elléouët-Breton, 2004

En Juin 1933, paraît le premier numéro de la revue "Minotaure" qui se donne pour emblème une hybride mi homme mi taureau.

 La couverture du premier numéro a été réalisée par Pablo Picasso, représentant une tête de minotaure stylisée.

Le minotaure dans l'imaginaire surréaliste, symbolise à la fois la complexité de l'inconscient et les tensions entre l'instinct et la raison.

Ce premier numéro contient des oeuvres d’André Breton, de Paul Éluard et de Salvador Dalí.

Les articles abordent des sujets comme la poésie, l'art, la psychanalyse et la mythologie.

Minotaure se distingue aussi par la reproduction d'œuvres d'art en couleur.

Les surréalistes visaient à élever la revue au rang d'œuvre d'art en soi.

Le premier numéro de Minotaure incarne l'esprit du surréalisme des années 1930.




Pablo Picasso (1881-1973)_Le Minotauromachie, 1935_Eau forte, grattoir et burin sur papier_Centre Pompidou, Paris_Donation Louise et Michel Leiris, 1984

Max Ernst (1891_1976)_Capricorne, 1948-1964_Bronze_Centre Pompidou, Paris_Don de l'artiste à l'Etat

André Masson (1896-1987)_Le Labyrinthe, 1938_Huile sur toile_Centre Pompidou, Paris_Don de Basil et Elise Goulandris, 1982

"Le mythe des Mères" occupe une place significative dans l'imaginaire surréaliste.

Inspiré par le "Second Faust" de Goethe (1832), ce mythe évoque des entités féminines primordiales.

Ils symbolisent des matrices universelles et des moules originels.

André Breton a ravivé cette notion en 1942 dans un texte dédié à l'œuvre d'Yves Tanguy, affirmant que ce dernier avait été "le premier à avoir pénétré visuellement dans le royaume des Mères".

 Pour Breton, ces "Mères" représentaient des matrices où toute chose pouvait se métamorphoser instantanément en une autre. 

Eugenio Granell (1912-2001)_El nacimiento de los pajaros, 1957_Huile sur toile_Claccion Fundacion Eugenio Granell, St Jacques de Compostelle

Membre du groupe surréaliste belge, Jane Graverol avec Paul Nougé et Marcel Marien fonde la revue "Les lèvres nues", subversive et anticléricale. Le premier N° paraît en 1954.

"Les Belles vacances" représente deux planctons observés au microscope.

Ces organismes dont la forme évoque des organes reproducteurs, sont les symboles de l'androgynie et de l'hermaphrodisme, synonymes d'un état du monde où le féminin et le masculin ne sont pas différenciés.

Jane Graverol (1905-1984)_Les belles vacances_Huile sur toile_Rediscovering Art By Women (RAW)

En avril 1925, trois oeuvres de Paul Klee sont reproduites dans "La Révolution Surréaliste".
Ses motifs de végétaux et d'organismes vivants rejoignent l'approche du vivant réclamé par les surréalistes.
Paul Klee (1879_1940)_Pflanzenwachstum, 1924_Huile sur carton_Centre Pompidou, Paris_Leg de Nina Kandinsky, 1981

Salvator Dali suit de près l'évolution de la peinture surréaliste. 
Il admet la perméabilité de sa peinture à celle de Yves Tanguy. 
Il emprunte les paysages désertiques ponctués de formes ectoplasmiques.
Salvator Dali (1904-1989)_Les efforts stériles, 1927-1928_Huile sur panneau de bois contreplaqué_Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia, Madrid

Yves Tanguy (1900-1955)_Maman, papa est blessé I, 1927_Huile sur toile_MoMa New York
Yves Tanguy (1900-1955)_Vent, 1928_Huile sur toile_Collection Simone Collinet

Chirurgienne pendant la 1er Guerre Mondiale, spécialiste en neurologie, Grace Pailthorpe étudie l'automatisme dès 1935 et expose avec le groupe surréaliste anglais l'année suivante.

Convaincue de la fonction thérapeutique de l'art, elle attribue au surréalisme et à la psychanalyse le rôle de "libérer l'individu de ses conflits interne afin qu'il puisse fonctionner librement"
Grace Pailthorpe (1883_1871), May 16, 1941, 1941_Huile sr toile montée sur carton_Tate

Meret Oppenheim (1913-1985)_Le vieux serpent nature, 1970__Toile de jute, charbon, anthracite, bois peint_Centre Pompidou, Paris_Achat de l'Etat, 1974

Helen Lundeberg (1908-1999)_Plant and Animal Analogies, 1934-1935_Huile sur celotex_The Buck Collection 

En janvier 1936, Victor Brauner présente à la galerie d'Alexandre Lolas, un cycle de quatorze toiles intitulées "Mythologies et fête des mères"

Il signe ainsi son allégeance aux théorie de Carl Gustav Jung, alors que Freud analysait le rêve comme le refoulement des fantasmes personnels, Jung y voit l'expression objective de l'inconscient collectif. 

Victor Brauner (1903-1966)_La mère des rêves, 1965_Huile sur toile et huile sur bois_Musée d'art moderne t d'art contemporain des Sables d'Olonne

"Le mythe de Mélusine" a fasciné les surréalistes, en raison de son caractère mystérieux et féminin, qui correspondait à leur goût pour l’irrationnel et le merveilleux.

Dans la légende médiévale, Mélusine est une femme-fée qui se transforme en serpent de la taille à la queue certains jours.

Quand son époux Raymondin découvre son secret, elle s’enfuit, criant une malédiction avant de disparaître. 

Ce récit, qui touche au tabou, au mystère du féminin et à la métamorphose, a séduit les surréalistes pour plusieurs raisons, d’abord Mélusine incarne une femme-fée dotée d’un pouvoir magique et secret, ce qui fait écho aux figures féminines idéalisées par les surréalistes, elle rejoint aussi d’autres figures féminines comme la sorcière, la sirène ou la femme fatale.

André Breton mentionne Mélusine dans "L’Amour fou" (1937), où il évoque la fée comme une image de la femme inspiratrice et insaisissable.

Max Ernst et Leonora Carrington ont créé des œuvres où l’hybride féminin-animal rappelle Mélusine.

L’écrivain Michel Butor, influencé par le surréalisme, a aussi exploité ce mythe.

Mélusine est une figure qui correspond parfaitement aux thèmes chers au surréalisme : l’amour fou, la métamorphose, le mystère et le merveilleux caché dans le quotidien. 

André Masson (1896-1987)_La Métamorphose de amants, 1938_Huile sur toile_Collection Simone Collinet

Née en Inde, élevée en Angleterre Ithel Colquhoum hérite d'une double culture, indouiste et celte. En 1939, elle intègre le groupe surréaliste anglais, mais en est exclue un an plus tard en raison de sa pratique de l'alchimie et son refus de quitter les sociétés occultes.

"L'artiste trouve dans l'alchimie la réconciliation des genres, de l'humain et de la nature évoquée dans ses paysages végétaux, comparables à des corps féminins".
Ithel Colquhoum (1906-1988)_Alcove I, 1946_Huile sur carton_Collection Denise et Richard Shillitoe

Ithel Colquhoum (1906-1988)_Scylla, 1938_Huile sur panneau_Tate

Paul Delvaux (1897-1994)_L'aurore, 1937_Huile sur toile_Peggu Guggenheim Collection

Eileen Agar (1899-1991)_The Wings of Augury, 1936_Bois, terre cuite, coton, cadran métallique et éléments organiques sur une base en ardoise_Centre Pompidou, Paris_Achat avec la participation du fonds du patrimoine, 2019

Max Ernst (1891_1976)_Le jardin de la France, 1962_Huile sur toile_Centre Pompidou, Paris_Dation, 1962

Maria Martins (1894-1973)_Prométhée, 1948_Bronze_Collection particulière

Baya (1931-1998)_Sans titre_Gouache sur papier_Collection particulière

"La forêt" est un motif récurrent dans l’imaginaire surréaliste, souvent utilisée pour symboliser l’inconscient, le mystère et l’inquiétante étrangeté.

Max Ernst est sans doute l’un des artistes qui a le plus exploré la forêt dans ses œuvres. Dans sa série de peintures "Forêt et Horde", il crée des paysages denses et sombres à l’aide de techniques comme le frottage et le grattage, donnant à la forêt une texture presque organique, comme un monde en métamorphose.

André Breton, dans ses écrits, fait souvent référence à la forêt comme un lieu de révélation surréaliste, où l’imaginaire et le réel se rencontrent.

René Magritte, dans des œuvres comme "Le Blanc-Seing" (1965), joue avec la transparence et la superposition des éléments forestiers pour troubler la perception du spectateur.

Giorgio de Chirico, précurseur du surréalisme, utilise parfois des éléments de forêt dans ses paysages oniriques et métaphysiques.

André Masson (1896-1987)_Sous-Bois, vers 1923_Huile sur toile_Collection particulière


André Masson (1896-1987)_Paysage de forêt sablonneux, 1924_Huile sur toile_Kunsthalle Bremen

Eugenio Granell (1912-2001)_Les blasones magicos del vuelo tropical, 1947_Huile sur toile_Coleccion Fundacion Eugenio Granell, St Jacques de Compostelle


Wilfredo Lam (1902-1982)_Nu dans la nature, 1944_Huile sur papier Marouflé sur toile_Centre Pompidou, Paris_Dation 1985

La fascination de Breton pour l'oeuvre du peintre romantique 
Caspar David Friedrich éclaire son choix d'intégrer l'artiste dans "L'art magique" publié en 1957.

Une nouvelle relation à la nature s'est imposée à lui au moment où les forêts allemandes commençaient à être menacées par l'industrialisation.

Caspar David Friedrich (1774-1840)_Frühschnee, 1821-1822_Huile sur toile8hamburger Kunsthalle_Acquis en 1906

Héritier du romantisme allemand, Max Ernst y puise l'exemple d'une nature en constante mutation.

Le thème de la forêt apparaît dès les premiers frottages de 1925 et restera central toute sa vie.

Toutes présentent la même composition, un plan unique et frontal, formant une épaisse palissade qui laisse deviner un bout de ciel et au centre un disque (oeil, lune ou soleil).
Max Ernst (1892-1976)_Vision provoquée par l'aspect nocturne de la Porte Saint Denis, 1927_Huile sur toile_Collection particulière

Max Ernst (1892-1976)_La forêt, 1927_Huile sur toile_Musée de Grenoble_Don de l'artiste, 1931

Joseph Cornell (1903-1972)_Owl Bos, 1945-1946_Boîte en bois contenant un ensemble d'éléments divers, bois, mousse, figurine en papier_Centre Pompidou, Paris_Don de François de Menil en mémoire de Jean de Menil, 1977

"Voici jailli de ses doigts le grand totem en fleurs" écrit Breton dans la préface qu'il consacre à la première exposition d'Augustin Cardenas à la galerie A l'Etoile.

Ses totems rendant hommage au peuple Dogon du Mali, témoignent de son désir de renouer avec la dimension magique de la nature.
Augustin Cardenas (1927-1975)Grand Totem, 1974-1975_Bois_Monsieur et Madame Robert Vallois

Breton se donnait pour épitaphe "Je cherche l'or du temps"

Le surréalisme partage avec l’alchimie une quête de l’insaisissable, du merveilleux, et du dépassement des apparences pour révéler une vérité cachée.

André Breton, passionné d’ésotérisme, voyait dans l’alchimie une métaphore parfaite du processus poétique et créatif : transformer le banal en extraordinaire, le plomb en or, la réalité en rêve.

Dans L’Art magique (1957), il écrit : "L’alchimie est la science des transformations et, à ce titre, elle rejoint la poésie dans son aspiration à la transmutation du réel."

Comme en alchimie, le surréalisme vise la fusion du rationnel et de l’irrationnel, du visible et de l’invisible, du masculin et du féminin.

La pierre philosophale devient une métaphore du pouvoir de l’art.

À l’image de l’alchimiste cherchant la pierre, le surréalisme est une quête perpétuelle de révélation et d’émerveillement.

La pierre philosophale est pour les surréalistes une métaphore de l’acte créateur, une manière de transformer la réalité pour atteindre un état supérieur de conscience.

Elève de l'Académie André Lhote, Yahne Le Tourmelin s'installe au Mexique en 1950 avec son époux Jean-François Revel. Elle y rencontre Leonora Carrington qui lui enseigne la technique de la tempera sur bois et inspire son iconographie, marquée par la mythologie Celtique.

Elle multiplie les détails symboliques et références magiques. En 1955, elle fait la connaissance de Breton et expose à la galerie "A l'Etoile Scellée" avant de s'affilier à l'abstraction. 

En 1967, lors d'un voyage en Inde, elle devient la première femme moine bouddhiste française. Elle est la mère de Mathieu Ricard.

Yahne Le Tourmelin (1923_2023)_Le cheval de Merlin l'enchanteur, 1953_juile sur papier marouflé sur toile_Collection particulière

Remedios Varo (1908-1963)_Alegoria del inverno, 1948_Gouache sur papier_Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia, Madrid

Remedios Varo (1908-1963)_Papilla Estelar, 1958_huile sur masonite_collection FEMSA

Remedio Varo (1908-1963)_Creacion de las aves, 1957_Huile sur Masonite_Acervo Museo de Arte Moderno INBAL

Victor Brauner (1903-1966)_La pierre philosophale_1940_Huile sur toile_Musée d'Art Moderne et contemporain de Saint Etienne Métropole


Gordon Onslow Ford (1912-2003)_Propagande for Love, 1940_Huile sur toile_Lucid Art Foundation Collection

Jacques Hérold (1910-1987)_Le grand transparent et la nourriture du grand transparent, 1947/1964 et 1947_Plâtre; Plat en céramique contenant deux hémisphères terrestres, fil à plomb en acier_Centre Pompidou, Paris_Achat 2015

Formée en autodidacte en Italie, Leonor Fini se rapproche des surréalistes et expose régulièrement à leurs côtés, sans pour autant intégrer le groupe.
Sa peinture emprunte symbolisme. Elle écrit : "Dans l'histoire de la peinture, j'ai toujours été attirée par la nuit pompéienne, la nuit des gothiques rhénans, la nuit maniériste, la nuit caravagesque, celle des romantiques allemands."
Leonor Fini (1907-1977)_Extrême nuit, 1977_Huile sur toile_Galerie Minsky,_Collection particulière

En 1950, Judit Reigl parvient à quitter clandestinement la Hongrie pour la France.
A Paris, elle retrouve son compatriote Simon Hantaï qui lui présente André Breton. Pour remercier celui-ci d'une visite de son atelier elle lui offre cette toile, inspirée des vers des "Chants de Maldoror" de Lautréamont.

Breton écrit à l'artiste "Vous me donnez un des grands émerveillements de ma vie. Je n'aurais jamais cru que cette parole de Lautréamont pût trouver image à sa hauteur"
Cette vision cauchemardesque nourrit de ses souvenirs de l'exil et des "Chevaliers de l'apocalypse", figure dans l'exposition que Breton consacre à l'artiste en 1954
Judith Reigl(1923-2020)_Ils ont soif insatiable de l'infini, 1950_Huile sur toile_Centre Pompidou, Paris_Achat 2003

"L’Hymne à la nuit", prend une résonance particulière chez les surréalistes, qui voient dans la nuit un espace privilégié pour l'exploration de l'inconscient, du rêve et du mystère.

Les surréalistes sont fascinés par la nuit car elle représente le royaume de l’inconscient (La nuit est le temps du rêve, de la dérive mentale, du surréel qui surgit quand le contrôle rationnel faiblit.)

Chez les surréalistes, elle est aussi teintée de menaces et de métamorphoses troublantes.

Dans son recueil "Paris la nuit" (1933), le photographe roumain, Brassaï prouve sa puissance de métamorphose, sa capacité à transformer la ville moderne en un labyrinthe archaïque, ouvert au merveilleux.

Les surréalistes plongent dans l'obscurité avec "L'exposition internationale du surréalisme" qu'ils organisent en 1938 à la Galerie des beaux Arts de Paris.

Dans un couloir sombre sont exposées des reproductions de photos de Brasaï


Quelques-unes de ses photos
Brasaï (1899-1984)_Jardin du Luxembourg_Epreuve gélatino argentique_Centre Pompidou, Paris_Doantion Madame Gilberte Brassaï, 2002

Brasaï (1899-1984)_Statue du Maréchal Ney dans le brouillard, 1932_Epreuve gélatino argentique_Centre Pompidou, Paris_Achat, 2007

Brasaï (1899-1984)_Passage du Palais-Royal, 1932_Epreuve gélatino argentique_Centre Pompidou, Paris_Doantion Madame Gilberte Brassaï, 2002

Brasaï (1899-1984)_Première nuit Young : "Le jour est trop court" ou le Grand Canal de l'Ourcq, vers 1932_Epreuve gélatino argentique_Centre Pompidou, Paris_Achat, 1994

Brassaï (1899-1984)_Le ruisseau, vers 1930-1932_Epreuve gélatino argentique_Centre Pompidou, Paris_Achat, 1997

René Magritte (1898-1967)_L'Empire des Lumières, 1954_Huile sur toile_Musée Royaux des Beaux Arts, Bruxelles

Jean Miro(1893-1962)_Chien aboyant à la lune, 1925_Huile sur toile_Philadelphia Museum

"Les Larmes d'Éros" (1961) de Georges Bataille partage avec le surréalisme une fascination pour l’érotisme, le désir et la mort, mais s'en distingue par une approche plus philosophique et anthropologique. 

Bataille explore l’érotisme comme une force qui unit l’homme à la mort, à travers des images fortes mêlant sacré, transgression et violence.

Le surréalisme, considérait le désir comme une énergie révolutionnaire capable de briser les carcans sociaux.

Ils ont souvent représenté des corps morcelés ou transformés de manière onirique et dérangeante. Ils s’inspiraient de Freud et de l’exploration des rêves pour libérer les pulsions cachées.

Membre du grand Jeu, proche des surréalistes parisiens, Mayo retourne dans son Egypte natale en 1937. Son oeuvre d'une grande sensualité et peu à peu gagnée par la cruauté et la violence. Sa violence intime se  superpose à la violence politique du moment.

Mayo (1905-1980)_Dessin cruel, 1937_Technique mixte sur toile_Collection Sylvain et Evelyne Yeatman-Eiffel

Jindrïch Styrsky (1899-1942)_L'homme seiche, 194_Huile sur toile_Collection Géraldine Galateau, Paris

Wiljelm Freddie (1909-1995)_Les tentations de st Antoine, 1939_Huile sur toile_Centre Pompidou, Paris

Pablo Picasso (1881-1973)_Le Baiser, été 1925_Huile sur toile_Musée National Picasso, Paris



Hans Bellmer (1902-1975)_La poupée, 1935-1936_Bois peint et matériaux divers_Centre Pompidou, Paris_Don de l'artiste à l'Etat, 1972

Salvator Dali (1904-1989)_Visage du grand masturbateur, 1929_Huile sur toile_Musée Nacional des arts reine Sofia,

"Le cosmos" occupe une place fascinante dans le surréalisme, souvent associé à l’infini, au merveilleux, et à l'exploration de l’inconscient.

Les surréalistes ont vu dans le cosmos une extension du rêve, un espace d’énigme et de transgression qui échappe au rationnel.

Chez les surréalistes le cosmos est un miroir de l’inconscient, un espace de désir, de hasard et de mystère.  

Jean Peyrissac ( 1885-1974)_Indicible cosmos, 1931_Bois peint, acier, ficelle, éclairage électrique_Centre Pompidou, Paris_Achat de l'Etat, 1974

Jacqueline Lamba ( 1910-1993)_Derrière le soleil, 1943_Huile sur toile_Weinstein Gallery de San Francisco

Oscar Dominguez (1906-1957)_Fantasia cosmica, 1938_Huile sur toile_Collection particulière

Joan Miro (1893-1983)_Femmes encerclées par le vol d'un oiseau, 1941_Gouache et lavis à l'huile sur papier_Collection particulière

Joan Miro (1893-1983)_ L'étoile matinale, 16 mars 1940_ gouache, huile et pastel sur papier _Fondacio Joan Miro, Barcelone

Figure Iniet, Tolaï_Nouvelle Bretagne, XIXe siècle_Bois polychrome, fibres naturelles_Collection particulière, Paris

Rufino Tamayo (1899-1961)_Cuerpos celestes, 1946_Huile et sable sur toile_Peggy Guggenheim, Collection

John Tunnard (1900-1971)_Luna Synthesis, 1944_Aquarell, gouache t crayon sur papier_Minneapolis Institute of Art

Alan Glass (1932-2023)_L'Agriculture céleste, 1996_Techniques mixtes_Collection particulière, Paris

Conçue à la façon d’un labyrinthe, l’exposition «Surréalisme» est une plongée inédite dans l’exceptionnelle production artistique du mouvement surréaliste, né en 1924 avec la publication du Manifeste fondateur d'André Breton.

Avec près de 500 œuvres et documents appartenant aux principales collections publiques et privées internationales, l’exposition a proposé une incroyable rétrospective.

Comme l'ont précisé les commissaires de l'exposition, Didier Ottinger et Marie Sarré, le mouvement s'est poursuit au moins jusqu’en octobre 1969, date de sa dissolution officielle et ne se réduit pas à la sphère parisienne ou européenne : « On sait désormais qu’il a essaimé dans le monde entier, aux États-Unis bien sûr mais aussi en Amérique latine, au Maghreb, en Asie, et qu’il s’est très largement enrichi des apports de ces foyers internationaux. » précise Marie Sarré.

L’exposition a mis en lumière les œuvres des femmes surréalistes (Leonora Carrington, Remedios Varo, Ithell Colquhoun, Dora Maar, Dorothea Tanning…) qui partagent les cimaises aux côtés de leurs collègues hommes. 

 « La place des femmes dans le groupe a été largement reconsidérée ces dernières années. Aucun mouvement du 20e siècle n’a compté autant de femmes parmi ses membres actifs, loin du statut de muses auquel on a souvent voulu les réduire », toujours selon les propos de Marie Sarré.


Texte de Paulette Gleyze

Photos de Anne, Gérard et Paulette Gleyze






























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