jeudi 4 septembre 2025

De l'or au bout des doigts_exposition au Musée savoisien de Chambéry


Du 02 avril 2025 au 01 septembre 2025 s'est tenue l'exposition "De l'or au bout des doigts_Artistes et artisans dans les Etats de Savoie au Moyen Âge".

Le 22 août 2025 nous parcourons cette exposition accompagnés d'une guide.

Le Musée Savoisien ouvre officiellement ses portes au public le 18 novembre 1913, dans l’ancien évêché et archevêché jouxtant la cathédrale Saint-François-de-Sales, après la loi de séparation des Églises et de l’État en 1905.

Il est l'héritier du Musée Départemental créé en 1864 par le marquis Pantaléon Costa de Beauregard, premier président du Conseil Général de Savoie.

Ancien couvent pour moines franciscains fondé au XIIIe siècle, il est devenu palais épiscopal au XVIIIe siècle.

Il est classé Musée de France et Monument Historique en 1911.

Transmis par la ville de Chambéry au département de la Savoie en 2012.

Il ferme en décembre 2014 pour une rénovation complète visant à moderniser la muséographie, améliorer l’accessibilité, et renforcer la conservation des collections.

Des fouilles archéologiques sont également menées dans ses sous-sols.

Il est inauguré le 27 avril 2023 et réouvre le 29 avril 2023, après près de huit ans de travaux sur plus de 2 000 m² d’espaces de visite et un nouveau parcours muséographique structuré autour de sept grandes thématiques, retraçant l’histoire de la Savoie du Paléolithique à aujourd’hui.

L'exposition "De l'or au bout des doigts_Artistes et artisans dans les Etats de Savoie au Moyen Âge" nous permet de découvrir des œuvres spectaculaires du Moyen Âge (XIIIe–XVIe siècles) provenant de Savoie mais aussi de Haute-Savoie, d’Italie et de Suisse. Elle est l'aboutissement d'un projet collectif transfrontalier mené par le réseau "Art Médiéval dans les Alpes". Ce réseau, dont les premiers jalons ont été posés aux débuts des années 2000 sous le nom de "Sculpture médiévale dans les Alpes", rassemble les institutions patrimoniales suisses, italiennes et françaises pour mener des recherches sur les oeuvres produites au Moyen Âge dans les anciens Etats de Savoie. 
L'exposition a vu le jour grâce au Musée Savoisien.

Elle rassemble des œuvres originales sélectionnées dans le cadre d’un projet transfrontalier avec le réseau Art médiéval dans les Alpes, des institutions comme le Palazzo Madama à Turin, le Musée château d’Annecy et le Musée d’histoire du Valais.

Elle est une synthèse des expositions organisées en 2020-2021 par plusieurs institutions italiennes, suisses et françaises participant au réseau Art Médiéval dans les Alpes.

Elle met en lumière les peintres, sculpteurs, orfèvres, maîtres verriers, forgerons, menuisiers etc... qui ont produit oeuvres et objets.

L'exposition présente des objets de la fin du Moyen Âge et du début du 16e siècle.

La distinction contemporaine entre artiste et artisan n'existe pas au Moyen Âge.
Aujourd'hui, l'artiste est reconnu pour sa créativité qu'il montre par sa signature, alors que l'artisan est considéré comme un manuel doté d'un savoir-faire. 

Au Moyen Âge, la plupart des oeuvres ne sont pas signées car leurs créateurs ne revendiquent pas une place dans la société.

Les artistes et artisans qui ont travaillé pour la cour de Savoie sont plutôt bien connus par les sources comptables mais les autres sont difficiles à connaître en raison de l'absence d'archives.

Il y a peu de corporation dans les Etats de Savoie et il est donc difficile de connaître les métiers concernés.

Le premier artiste attaché à la cour de Savoie est mentionné en 1314, il s'agit du florentin Gregorio da Firenze.
Ces artistes reçoivent une pension annuelle en fonction de leur travail. Ils peuvent toutefois travailler pour d'autres commanditaires.

Il s'agit la plupart du temps de peintres, mais il peut s'agir aussi d'orfèvres.
Jean Bapteur (peintre) jouit entre 1427 et sa mort entre 1454 et 1457 d'une position de prestige à la cour d'Amédée VIII, Comte (1391-1415) puis du duc de Savoie (1416-1440) et de son fils Louis Ier, duc de Savoie (1440-1465). Il porte le titre de peintre du Duc, participe à des ambassades, enlumine des manuscrits exécute des peintures murales et peint des bannières, écus, costumes, casques...

Giacomo Jaquerio, mentionné à partir de 1404 à Turin, ne travaille qu'occasionnellement pour la cour, bien qu'il soit qualifié par Amédée VIII de "notre cher et fidèle peintre". Il est l'auteur de panneaux peints et de peintures murales. Il reçoit des commandes de princes et d'ecclésiastiques de haut rang. Il poursuit son activité jusqu'à sa mort en 1453.

L'ange musicien est de Giacomo Jaquerio. Le cardinal Jean de Brogny (1342-1426) fait sa carrière à la cour des papes d'Avignon. Originaire d'Annecy il conserve un lien régulier avec sa région. Il décide d'être inhumé dans la chapelle des Maccabées qu'il a fait construire dans la cathédrale de Genève. Il confie à deux artistes de la cour de Savoie, son ornementation : le peintre Giacomo Jaquerio et le sculpteur Jean Prindale, originaire de Bruxelles
Giacomo Jaquerio actif entre 1404 et 1453_Ange Musicien de la chapelle des Macchabées de la cathédrale de Genève_1411-1414_Fresque transposée sur toile_Musée d'art et d'histoire de la ville de Genève.

Saint Crépin, saint patron des artisans du cuir. Il s'agit d'une probable commande de la corporation des métiers du cuir de Chambéry.
Saint Crépin, saint patron des artisans du cuir_1500-1525_Noyer sculpté, peint, doré et comportant des brocarts appliqués_Musée Savoisien

L’étui de l’épée de Saint-Maurice, œuvre délicate signée Jean Bapteur, artiste au service du duc de Savoie, prêté par le Palais royal de Turin.

C'est un exemple marquant de la grande diversité des oeuvres et objets réalisés par les peintres de cour.

Cet étui destiné à conserver une relique, l'épée de St Maurice, a été commandée par Pierre Fornéry, abbé de St Maurice d'Agaume de 1434 à 3438 et conseiller d'Amédée VIII ainsi que de son fils Louis Ier. Sa commande s'inscrit dans la politique d'Amédée VIII qui fait de St Maurice son protecteur, notamment en instituant l'ordre de St Maurice en 1434.

Jean Bapteur_actif entre 1427 et 1454 ou 1457_Etui de l'épée de St Maurice_1434-1438_Bois, fer, cuir_Armeria Reale, Turin.

La libération de St Pierre , fragment de retable, de Giacomo Jaquerio. 

Bien qu'il soit peintre du Duc, Giacomo Jaquerio répond à de nombreuses commandes hors de la famille de Savoie, comme pour cette oeuvre qui porte les armoiries de Vincenzo Aschieri, abbé de Novalaise (Piémont).

Originaire de Turin, il voyage régulièrement entre Genève, Savoie et Piémont pour produire ses oeuvres.
Giacomo Jaquerio_actif entre 1404 et 1453_La libération de saint Pierre, fragment de retable_vers 1418_Tempera sur panneau_Palazzo Madama_Museo Civico d'Arte Antica_Fondazione Torino Musei

La fuite en Egypte de Jean de L'Arpe
Jean de L'Arpe appelé aussi Jean Le Mere, mentionné entre 1499 et 1537_La fuite en Egypte, fragment de retable_vers 1515_huile sur panneau_Eglise des Carmes de la Rochette, Savoie, classé monument historique

Le Christ bénissant entre la Vierge et saint Jean l'Evangéliste par Jean de Chiestro, mentionné en 1468-1470, auteur de la sculpture et de la polychromie.

Jean de Chiestro_Christ bénissant entre la Vierge et saint Jean l'Evangéliste_vers 1470_tilleul sculpté et peint__Palazzo Madama_Museo Civico d'Arte Antica_Fondazione Torino Musei

Lettres de noblesse concédées par le duc Amédée VIII de Savoie à Johannes Deistruz (Jean Destri).
Jean Bapteur a réalisé des oeuvres prestigieuses pour la cour de Savoie, comme l'Apocalypse conservé à l'Escurial en Espagne, qu'il a somptueusement enluminée. Il a enrichit d'une enluminure cet acte d'anoblissement produit par la chancellerie d'Amédée VIII pour marquer son importance pour Jean Destri, bourgeois de Genève.
Jean Bapteur_actif entre 1427 et 1454 ou 1457_Lettres de noblesse concédées par le duc Amédée VIII de Savoie à Johannes Deistruz_18 mars 1437_Encre et peinture sur parchemin_Dépôt aux Archives Cantonales Vaudoises, Lausanne

Peintre, sculpteur, maître verrier évoquent aujourd'hui des métiers différents. Au Moyen-Âge ces métiers étaient souvent exercés par la même personne dans les Etats de Savoie.

Ainsi Jean de Chetro reconnu comme l’un des deux sculpteurs principaux des stalles du chœur de la cathédrale d’Aoste autour de 1465–1469, avec Jean Vionin de Samoëns, alias Jean Vion de Samoëns, était aussi sculpteur sur pierre et peintre. 

De même l'inventaire de l'atelier annecien de Nicolas Dabert en 1506 montre qu'il exerçait comme peintre sur panneaux, sculpteur et maître verrier.

Jean de L'Arpe est nommé en 1531 "peintre et verrier" par le duc Charles II de Savoie (1504-1553); il est l'auteur de peintures religieuses mais il intervient aussi sur les verrières de la sainte chapelle du château de Chambéry. La polyvalence n'est cependant pas systématique.

Dans la salle suivante sont exposés des coffres en bois médiévaux imposants. Ils ont une grande valeur historique.

Les producteurs de meubles sont mal connus avant la fin du moyen Âge. Les sources écrites sont pauvres et les réalisations parvenues jusqu'à nous sont rares.

Les stalles des églises ont été mieux conservés que les coffres et armoires. Le contexte de leur commande est aussi plus facile à tracer.

Les coffres prêtés par le musée cantonal d’histoire du Valais à Sion (Suisse) sont une exception remarquable. Ils datent d’une période antérieure au XVe siècle.

Ils représentent des biens d’exception, qui témoignent de la maîtrise technique raffinée du travail du bois à l’époque médiévale.

L’un des coffres est décrit comme étant sculpté dans du noyer, une essence de bois particulièrement prestigieuse au Moyen Âge pour sa durabilité et son esthétisme.

Ces coffres étaient utilisés pour conserver des objets liturgiques.
Vue d'ensemble 

Coffre liturgique provenant de l'église de Valère daté de 1182 et de 1272-1273. 

La caisse en mélèze a probablement été produite avec du bois de réemploi, tandis que les pieds et le couvercle en pin d'arolle (pin cembro) datent de 1272-1273, période de fabrication du coffre. Les traces d'un seul rabot montre qu'il a été produit en une seule fois. Il servait probablement à conserver du matériel liturgique (bibles, vêtements, calices...) puis les archives du chapitre.
Bois daté de 1182 et de 1272-1273_Mélèze et pin d'arolle_Musée d'histoire du Valais, dépôt du chapitre de la cathédrale de Sion.

Ce coffre liturgique provenant de l'église de Valère daté entre 1433 et 1450 a été produit avec du bois encore vert, visible en raison de la déformation contenue par des ferrures des renforts. 

L'assemblage est réalisé par tenons et mortaises, les clous ne servant que de décoration.

 Il était probablement affecté à un autel de la basilique de Valère pour conserver orfèvrerie, ornements liturgiques ou cierges.

Bois daté entre 1433 et 1450_Noyer_Musée d'histoire du Valais, dépôt du chapitre de la cathédrale de Sion.

Ce coffre sculpté daté de 1560-1561, présente la même structure que ceux de la basilique de Valère. Il montre la permanence des formes dans la région de Sion du 13e au 16e siècle avec des pieds montants et une caisse surélevée.
Bois daté de 1560-1561_Pin d'arolle_Musée d'histoire du Valais, dépôt du chapitre de la cathédrale de Sion.

détail de rosace

détail de rosace

détail de rosace

détail de rosace

Ce coffre daté du milieu du 14e siècle provient de la commune de Sembrancher dans le Bas Valais qui a fait parti des Etats de Savoie de 1260 à 1475. 
Ses pieds moins hauts que ceux de Sion sont plus proches de la structure des coffres savoyards. 
Le bois a été abattu au plus tôt en 1336. le coffre a pu servir à conserver les archives communales.

Milieu du 14e siècle_Pin d'arolle_Musée d'histoire du Valais, dépôt du chapitre de la cathédrale de Sion.

arrière du coffre

 Ce bas relief constituait la partie centrale du dossier d'une stalle représentant un prophète. L'amincissement des bords montre qu'il devait s'insérer dans une rainure.
Probablement 1524_Noyer ?_Musée Savoisien

détail

L'inscription qui figure sur le piédestal du dorsal de la stalle représentant sainte Barbe, mentionne comme donateur en 1524, Humbert Recordon, chapelain. 

Cette date correspond au style des deux figures. Sainte Barbe est identifiable par ses attributs, la palme du martyr et la tour.
Probablement 1524_Noyer ?_Musée Savoisien


détail

Dans la petite salle suivante est exposé un assemblage de plusieurs fragments de vitraux.
Peu de vitraux médiévaux produits dans les Etats de Savoie sont parvenus jusqu'à nous.
La grande rose de la cathédrale de Lausanne, vers 1215-1220, en constitue le témoignage le plus ancien.

 La production d'une verrière commence par l'élaboration d'un carton, d'un dessin préparatoire qui peut être l'oeuvre d'un artiste qui ne travaille pas le verre ou du maître verrier lui même. Ils ont été très rarement gardés.

Les artistes se fournissent en verre soit directement auprès des producteurs, soit en particulier pour les verres de couleurs dans les villes marchandes comme Lyon, Grenoble ou Genève. 

La production des ensembles les plus importants requiert souvent l'association de plusieurs peintres ou verriers.

Ils viennent souvent de l'extérieur des Etats de Savoie, comme Pierre d'Arras originaire du Nord de la France (13e siècle) , jean Thibaud (cité en 1386), originaire de Langres (haute Marne), ou encore Hans Witz (actif de 1441 à 1478) et Michel Glaser (mentionné en 1454) originaire de Bâle (Suisse).

Un assemblage du 19e siècle de vitraux anciens.

Ce vitrail représentant le visage de femme en pleurs témoigne de la maîtrise technique des maîtres verriers actifs dans les Etats de Savoie au moyen âge. 

Sur le verre blanc, l'essentiel du dessin est tracé à la grisaille, un mélange d'oxyde métallique et de silice, rehaussé de deux bandes de jaune d'argent, c'est à dire une application de sels d'argent. 

Cette dernière technique attestée depuis le début du 14e siècle, permet de changer ponctuellement la couleur sans utiliser le plomb.
Vitrail du 16e siècle_visage de femme en pleurs_verre et plomb_Musée château d'Annecy






Provenant de l'église Saint Pierre aux liens de Gruffy (Haute Savoie), ce petit vitrail a probablement été produit par Hans Witz, maître verrier au service de la maison de Savoie depuis 1441. 
Il a certainement collaboré à la réalisation du volet de "la pêche miraculeuse" peint par Konrad Witz en 1444 pour la cathédrale de Genève. le succès de son atelier lui permet d'être reçu bourgeois de Genève en 1454. Il achève a carrière en 1476 à la cour du duc de Milan.
Saint Pierre_Hans Witz_actif entre 1440-1450_Verre rehaussé de grisaille et de jaune d'argent_Musée château d'Annecy

 Dans la salle suivante, sont exposés des Vierges de Pitié.

Ces images de dévotion témoignent d’une forte demande religieuse dans les Etats de Savoie entre 1450 et 1530, portée par les Franciscains et les princes de Savoie. 

Toutes ces sculptures présentent des caractéristiques communes : la Vierge est assise, le dos droit, la tête légèrement inclinée, elle soutient la tête du christ mort de sa main droite et sa hanche de sa main gauche.

Elle porte une robe au col rond et un manteau qui laisse apparaitre la pointe de ses chaussures et qui forme un S au sommet de sa tête et un second en V entre ses jambes. 

Les visages ont des arcades sourcilières nettement dessinées et des mentons ronds.


Vierge de pitié entre Saint Jean et Sainte Marie Madeleine_début du 16e siècle_noyer?_commune de Saint Jean de Chevelu (Savoie)_Chapelle de Notre Dame de Monthoux

Vierge de pitié entre Saint Jean et Sainte Marie Madeleine _dernier quart du 15e siècle_sculpture et polychromie_noyer polychrome_dépôt de la commune de Saint Offenge Dessus  (Savoie)_Musée savoisien

Vierge de pitié entre Saint Jean et Sainte Marie Madeleine _Début du 16e siècle_noyer_Académie florimontane, conservée au château de Montrottier  (Haute Savoie)

Vierge de pitié comportant les armoiries de la famille de Beaufort_1er quart du 16e siècle_noyer ?_Commune de Queige (Savoie) église paroissiale

Vierge de pitié_fin du 1500_noyer _Collection privée (Oulx, Piémont)

Vierge de pitié_Vers 1500_noyer ? _Commune de Saint François de Sales (Savoie)_église paroissiale

Vierge de pitié_1er quart du 16e siècle_noyer _Commune de Saint François de Sales (Savoie)_chapelle du petit Lagneux, déposée au musée savoisien

Vierge de pitié_vers 1500_noyer_Académie florimontane_conservée au chateau de Monrottier (Haute Savoie)

Vierge de pitié_fin 15e siècle_noyer_commune de Puygros (Savoie)_église paroissiale

Vierge de pitié_1er quart du 16e siècle, sculpture et polychromie_noyer _Commune de Yenne (Savoie)_Chapelle du petit Lagneux_déposée au musée savoisien

Les sculptures de la fin XVe, début XVIe siècle sont massives avec des proportions parfois disproportionnées (buste long, jambes courtes), visages lourds, arcades sourcilières marquées, menton épais et plis des drapés incisés .

Celles d'après 1520 ont un style plus ramassé, formel et homogène.

Il est probable que ces vierges soient l'oeuvre d'un ou plusieurs ateliers répétant la même formule à succès.

Le retentissement a été amplifié après l’acquisition de la relique du Suaire en 1453 et la création de la Sainte-Chapelle à Chambéry .

Dans la dernière salle est  exposé une collection rare de 12 bustes reliquaires médiévaux, chefs-d’œuvre techniques et artistiques réalisés en métal précieux.

Le Piémont, la Vallée d'Aoste et le Valais conservent aujourd'hui un ensemble remarquable de bustes reliquaires médiévaux, destinés à protéger et présenter les reliques d'un saint.

La présence de nombreuses mines d'argent et de cuivre dans le territoire dépendant de la maison de Savoie a pu faciliter l'accès aux matières premières nécessaires à la fabrication des plus prestigieux d'entre eux.

La conservation exceptionnelle de ces oeuvres s'explique aussi par une propension plus marquée que dans d'autres territoires à moderniser ces objets de dévotion, plutôt que de les remplacer.

Leur production nécessite le recours à des artistes ou artisans maîtrisant des techniques variées, comme l'orfèvrerie, la peinture, la sculpture.


Le buste reliquaire de Saint Maurice est en tilleul. Le tilleul est fréquemment utilisé pour les sculptures en Suisse à partir de la fin du 14e siècle. 

Il a été repeint à quatre reprises et son aspect actuel date de 1655.
1450-1470_tilleul sculpté, peint, doré et argenté_Eglise paroissiale de Bagnes, canton du Valais.
Bagnes appartenait à la famille de Savoie de 1143 à 1476. ce dont témoigne les nœuds de Savoie sur ce buste

Le Buste reliquaire de Ste Marguerite qui se trouvait à Mornex (Haute Savoie) au début du 19e siècle provient probablement d'une église genevoise. Il a pu être transféré hors de la ville après sa conversion à la Réforme en 1536.
Atelier de Peter et Mattelin Vuarser-Vers 1500_Noyer sculpté, présentant des restes de peintures et de dorures_Musée d'art et d'histoire de Genève. Peter et Mattelin Vuarser, père et fils, dirigeaient l'un des plus importants ateliers de sculpture genevois entre 1470 et 1530 et ont travaillé aux stalles de Saint Jean de Maurienne en 1498. 

Ce buste reliquaire d'un saint évêque a l'apparence de celui de créations d'orfèvrerie  plus prestigieuses qui étaient recouvertes de feuilles d'or et d'argent.

Cette oeuvre montre l'ampleur et la diffusion de ce type de reliquaires dans la Vallée d'Aoste.
1450_Bois sculpté, peint, doré et argenté_Collection régionale de la Région autonome de la Vallée d'Aoste. 

Ce buste reliquaire de St Grat est la réplique de celui du Saint Grat offert à la cathédrale d'Aoste en 1432, par le Duc de Savoie, Amédée VIII (1391-1440). 
18e-19e siècle_Bois sculpté et peint, argent, cuivre doré, pâte de verre, cristal de roche_Palazzo Madama_Museo Civico d'Arte Antica, Turin

 La qualité des bustes reliquaires de la cathédrale d'Aoste et l'importance des reliques qu'ils contiennent ont suscité plusieurs imitations comme ce reliquaire de Saint Gilles.

 Il en reprend la représentation à mi-buste, le visage peint, la mitre poinçonnée.

La longue vénération de ce reliquaire est visible dans les nombreuses restaurations et modifications notamment l'adjonction d'un nouveau socle au 19e siècle.
Fin 18e siècle_Argent peint et doré, bronze doré, cuivre argenté, bois sculpté, doré et peint, cristal, pierres, pâte de verre_Prieuré de Sr Gilles_Verrès, Vallée d'Aoste.

Le buste reliquaire de St Nicolas a perdu sa polychromie originale. 

La qualité modeste de cette oeuvre est la preuve de l'importance de ce type de reliquaire dans l'imaginaire religieux valdôtain de la fin du moyen Âge.

Il est possible que le buste ait été recouvert d'une feuille d'argent aujourd'hui disparue.
1530_Bois sculpté, peint et doré_Eglise paroissiale Saint Nicolas de Champorcher_Vallée d'Aoste.

L'arrivée des reliques de Sainte Justine de Padoue au couvent des Clarisses de Carignan en 1460, transférées depuis à Vicoforte, ne donne pas de certitude sur la présence de ce reliquaire à cette occasion. 

Il est essentiellement constitué de cuivre doré. Le visage est constitué d'une tôle d'argent, qui forme un masque sur un second visage en cuivre.
2e moitié du 15e siècle_cuivre doré, argent_Monastère Sainte Claire de Vicoforte, Coni, Piémont. Le nom de la sainte est inscrit sur le col.

 Dans son testament de 1444, le marchand de Mondovi, Guglielmo Badino rappelle qu'il a offert cinquante livres pour la fabrication du reliquaire de San Bernolfo.

 Il a pu être produit par un orfèvre de cette ville comme Benedetto Cadana, Pietro Clerici ou Pietro de Pauchapalea, mentionnés dans les années 1450.
Avant 1444_Argent partiellement doré, pâte de verre_Cathédrale saint Donat de Mondovi, Piémont. Son apparence a été changée par la perte de la pâte de verre qui garnissait ses pupilles et par l'adjonction de verres bleus.

L'orfèvre probable du b
uste reliquaire de Saint Victor est Goswyn van Bomel, orfèvre du duc. Le peintre probable est Gregorio Bono, peintre du duc, mentionné de 1400 à 1452-1453. 

Ce buste reliquaire entièrement en argent est probablement celui mentionné en 1418 dans un paiement à Gossuin de Bomel pour la dorure et à Gregorio Bono pour la peinture du visage et ensuite offert à l'abbaye par Amédée VIII.

Une couche de peinture masque l'argent, ce qui semble paradoxal.

Cela montre peut être la volonté de mettre les matières les plus précieuses en contact avec les reliques.
Avant 1418_Argent partiellement doré et peint émail_Musée du trésor de l'abbaye Saint Maurice D'Agaume, Canton du Valais.

La tête reliquaire de Saint Georges est représenté en chevalier reconnaissable à la bavière, pièce de la monture qui lui protège le cou. 

Ce reliquaire a été produit par un orfèvre piémontais ou lombard.

La commande de cette oeuvre par les habitants de Chieri témoigne du dynamisme économique de la ville au moment de sa soumission à la maison de Savoie.
Fin du 14e siècle_Argent doré, émaux, perles, pâte de verre, grenats_Eglise Saint Georges Martyr de Chieri, Piémont. 

Ces objets témoignent du raffinement des orfèvres médiévaux au service de la dévotion et du pouvoir religieux.
Les reliquaires exposés illustrent des liens artistiques et religieux entre Savoie, Piémont et Vallée d'Aoste, régions partagées par l’ancien duché savoyard.

La scénographie de l'exposition adopte l’ambiance d’un atelier médiéval.

Certains espaces sont aménagés pour permettre la manipulation à travers des maquettes, des supports pédagogiques ou des activités ludiques.

L’exposition "De l’or au bout des doigts" met en lumière le travail d’artistes artisans médiévaux (peintres, sculpteurs, orfèvres, menuisiers…) issus des anciennes terres de Savoie, d'Italie et de Suisse.

Les coffres en bois, tout comme les vitraux, métaux et reliquaires, s’inscrivent dans cette célébration des savoir-faire anciens.

L’exposition se distingue par ses œuvres spectaculaires.

C'est une  véritable invitation à découvrir le savoir-faire des artisans médiévaux.

C'est une petite exposition mais riche et intéressante.


Texte de paulette Gleyze

Photos de Gérard Gleyze

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