lundi 29 novembre 2021

L'archéologie au musée Unterlinden à Colmar



Ce 12 août 2021, nous visitons le musée Unterlinden à Colmar.

Le musée est créé sur la volonté de Louis Philippe Henri Hugot (1805-1864) convaincu de la "la nécessité de contribuer à former et développer le goût et le sentiment du beau". Il est archiviste et bibliothécaire à Colmar. Son intérêt pour les arts graphiques amène à créer avec les érudits locaux, la société de Martin Schongauer en 1847.

Deux ans plus tard, la Société Schongauer publie un projet de transformer le Couvent des Dominicaines en musée.

Installé dans l'ancien couvent des chanoinesses de l'ordre des Dominicaines fondé en 1252 par Agnès de Mittelnheim et Agnès de Hergheim, ce couvent d'architecture gothique conserve une grande partie de son caractère médiéval même s'il a subi de nombreuses modifications au fil des siècles.

Construit de 1280 à 1289, le cloître est un peu plus tardif .

A la Révolution, en 1790, le couvent a été fermé et laissé à l'abandon servant de caserne militaire jusqu’au milieu du XIXe siècle avant de devenir musée en 1849.Il fait l'objet d'un classement au titre des monuments historiques depuis le 4 mai 1852.

Le musée renferme l’un des chefs d’œuvre de l’art occidental : le retable d'Issenheim, impressionnant polyptyque sculpté par Nicolas de Haguenau vers 1510 et peint par Mathias Grünewald de 1512 à 1516. Cet ensemble est considéré comme une pièce majeure de l’histoire mondiale de l’Art.


Unterlinden propose un parcours de visite couvrant près de 7000 ans d’histoire allant de la Préhistoire à l’art du 20e siècle : une collection d’archéologie, une collection d’art du Moyen Age et de la Renaissance et une collection d’art moderne avec des œuvres d’artistes comme Monet, Picasso et Dubuffet...

Au sous-sol, dans les anciennes caves voûtées du couvent des Dominicaines, nous découvrons la riche collection archéologique qui présente une collection de pièces allant du Néolithique jusqu'au Haut Moyen Âge.

Le parcours de visite chronologique permet de découvrir les différentes étapes de l'évolution de l'Homme, artisanat, habitat, vie domestique, pratiques funéraires à travers d'innombrables objets.

Les pièces exposées sont issues de découvertes archéologiques dans la moitié nord du Haut-Rhin. Les fonds anciens sont enrichis par les objets trouvés lors de fouilles récentes. Nous découvrons des objets rares comme les grandes jarres néolithiques à décor rubané ou les bijoux en or de la sépulture princière d’Ensisheim.

L’inauguration de cet espace a eu lieu le 23 janvier 2020.

La répartition inégale des gisements de silex favorise l'importation. Les matières premières proviennent du bassin parisien, du Jura et de l'Allemagne actuelle. Le silex est extrait de bloc brut. Les couches extérieures sont retirées à l'aide d'un percuteur dur. De cette manière on peut produire différentes armes et ustensiles : flèches, faucilles, grattoirs...

Vers 2400 ans avant JC, la culture campaniforme touche toute l'Europe tempérée. Elle est nommée ainsi d'après les vases en forme de cloche (campana en latin), caractéristiques de la période.

Dans la région de Colmar, ce sont des tombes individuelles qui ont livré les 1er témoignages des civilisations campaniformes. Elles contenaient des céramiques, des objets en silex et parfois des équipements d'archers avec des flèches, des haches et des brassards en pierre.

Au Néolithique, le façonnage des poteries est exclusivement réalisé à la main selon la technique du colombin ou du modelage. Une fois façonné, la poterie est séchée puis cuite dans une grande fosse. L'argile, matière première, est abondante dans la région.

Du néolithique à la période romaine le stockage des denrées évolue peu. Des jarres de grande taille comme celle-ci découverte à Merxheim servaient à stocker des liquides et de l'alimentation.

Le passage à l'âge du bronze, à la fin du 3e millénaire avant notre ère transforme les sociétés préhistoriques. La période dure près de 1500 ans. Les matières premières et les objets circulent. Tout au long de la période les techniques de travail du bronze évoluent et touchent de nombreux domaines comme l'armement (épées, poignards, armatures), l'outillage, des éléments de parure (torques, bracelets...)

Résistant et plus malléable que la pierre, le bronze permet la diversification des objets, les artisans produisent des moules pour couler le métal et produire en série.

Le bronze est un alliage constitué d'environ 90% de cuivre et 10% d'étain. Le cuivre provient dans un premier temps des montagnes des Carpates avant d'être extrait dans le massif central, les Alpes, les Cévennes. L'étain est extrait de la cassitérite un métal présent en Bretagne.

L'âge du bronze transforme la société, les réseaux d'échange entrainent une mutation économique et favorisent la diffusion des cultures et des modes de vie.

La culture des sols se poursuit, les villages, hameaux, parcelles agricoles... se structurent. A la fin de la période la fortification par des fossés, des remparts, des palissades se développe et montre l'établissement de centres de pouvoir et les tensions régionales.

Résistant et plus malléable que la pierre, le bronze permet la diversification des objets du quotidien. Au cours de l'âge du bronze les techniques de travail évoluent. Le martelage à froid est la technique la plus simple, puis les artisans fabriquent des mules. La technique de la fonte à la cire perdue facilite la fabrication aux formes plus complexes.

L'armement se développe avec des épées ou des lances en bronze.

Une tombe de l'âge du bronze ancien (entre -2000 et -1800) a été découverte en 1924 à Eguisheim dans la carrière des Tuileries. Elle contenait les restes de 2 personnes. Ils ont été inhumés en position fléchie. L'un avait un torque lisse à petits tampons, un poignard court et une pointe de flèche en silex.

Poignards, armatures de flèches, torques en alliages cuivreux ont été également retrouvés.

L'âge du fer (-800 à -50) fait suite à l'âge du bronze. L'armement se développe et se spécialise. Une aristocratie guerrière prend le contrôle des territoires.

Au début de la période de l'âge du fer, appelée période de Hallstatt (première période qui va de -800 à -450), ils mettent en place le siège de leur autorité sur des sites fortifiés. Installés sur des routes commerciales, ils nouent des relations avec le monde méditerranéen, comme en témoigne de la vaisselle étrusque ou grecque retrouvée dans des tombes princières.

La deuxième période, appelée période de la Tène (de -450 à -50), connait d'importantes migrations en Europe. C'est à cette période qu'apparait la monnaie et la diversification des activités artisanales.

La période se termine avec la conquête romaine, le territoire alsacien étant intégré à l'Empire Romain à la suite de la conquête des Gaules par Jules César en 52 avant JC.

Les sociétés de la 1ère période de l'âge du fer enterrent leurs chefs dans des tombes prestigieuses, des tumulus. Des objets symboliques les accompagnent.

Un tumulus à Riedwihr a livré 21 sépultures dans les années 1980. La tombe centrale, la plus riche contenait un poignard exceptionnel par sa forme et son décor. Il date de la 1ère période de l'âge du fer (première moitié du 6e siècle avant notre ère).

Les parures à l'âge du fer sont diverses en termes de formes, de décors et de matériaux pour les réaliser. Le bronze est toujours utilisé mais de nouveaux matériaux comme le schiste, le fer, l'or, le verre et le corail apparaissent.

En 1873, découverte à Ensisheim d'une tombe sous tumulus qui a livré des parures en or de grande qualité ainsi qu’un fer de lance.

Il s’agit d’une tombe « princière », qui date de -550 à -480. Elle témoigne du haut niveau de richesse de l’élite de cette période.

Le torque en or ou collier rigide à décor repoussé correspond à un symbole du pouvoir temporel et spirituel du « prince ». Il est l'attribut par excellence des princes celtes dans la 2e moitié du 6e siècle avant notre ère.

Le torque d'Ensisheim est exceptionnel par la finesse de son décor, son poids élevé, et la pureté de son alliage (plus de 98% d'or pur).

Le bracelet en or massif constitue une pièce unique, les éléments décoratifs sont en forme de têtes de bélier stylisées.

Les boucles d'oreilles sont en alliage cuivre et or, l'anneau est en or et la pointe de lance est en fer.

Le site archéologique de saine Croix en Plaine, situé à 11km de Colmar, a révélé l'une des plus grandes nécropoles fouillées en Alsace.. Elle a eu une occupation de plus de 700 ans, de l'âge du bronze final, au 2e âge du fer.

Entre 1979 et 2005, le site a connu plusieurs campagnes de fouilles. Une soixantaine d'enclos circulaire témoigne de la présence de tumulus, aujourd'hui aplanis par les labours et l'érosion du sol. Plus d'une centaine de tombes ont été mises à jour.

Dans cette vitrine, les découvertes archéologiques de Sainte croix sont présentées par structures archéologiques (sépultures, fossés, tranchées...) c'est ainsi que travaillent les archéologues sur le terrain et qu'ils inventorient les vestiges d'un site.

Une partie seulement de l'important mobilier céramique mis au jour est exposée.

La plupart des objets en terre n'est pas restaurée, ils témoignent de la réalité des découvertes archéologiques. L'étude des objets permet ensuite de proposer des datations et de définir les phases d'occupation d'un site.

La visite continue avec la période romaine, la période mérovingienne et le Haut-Moyen âge.
Une magnifique mosaïque gallo-romaine de 80 m2 datant du IIIe siècle a été découverte en 1848 sur le coteau de Bergheim.

Elle fait partie des premières œuvres fondatrices du musée Unterlinden.

Si à l’origine elle mesurait plus de 80 m2, il n'en reste aujourd'hui que 18 m2.

Cette mosaïque occupait à l'origine le sol d'une salle d'apparat d'une grande villa. Elle devait être détruite mais sa destination à la chapelle du couvent d'Unterlinden a permis de la sauver. Aujourd'hui elle est exposée au sous-sol avec les collections archéologiques.

Il s’agit d’une mosaïque de pavement polychrome, qui évoque un tapis richement orné. Elle comporte des motifs géométriques avec quelques motifs figurés : neufs cercles inscrits dans des carrés quadrilobés alternent avec huit carrés inscrits dans des quadrilatères curvilignes et dix-huit petits carrés à côtés concaves. Les motifs sont bordés d’entrelacs à deux brins.

Les décors sont caractéristiques des ateliers des ateliers de la région de Trèves, ville impériale du 3e siècle après JC.

Non loin de la mosaïque gallo-romaine se trouve la “cave alsacienne" avec ses véritables fûts qui témoignent de la florissante activité viticole de la région.

La visite continue dans le cloître qui est une véritable une vitrine de l’Art Rhénan en France.
Nous pouvons y admirer une remarquable collection de peintures et de sculptures représentatives de l’art historique de la région de Colmar des 15e et 16e siècles.
Cela fera l'objet d'un prochain article.


Texte de  Paulette Gleyze

Photos de Paulette, Anne et Gérard Gleyze

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