mardi 2 mai 2023

Exposition Gérard Garouste, l'Intranquille _Centre Pompidou_12 novembre 2022

Après avoir vu :

l'exposition "Munch, un poème d'amour et de mort au musée d'Orsay" :
https://ballades-page3873.blogspot.com/2022/12/munch-un-poeme-de-vie-damour-et-de-mort.html

L'exposition "Rosa Bonheur" au musée d'Orsay :
https://ballades-page3873.blogspot.com/2022/12/rosa-bonheur.html

L'exposition "Sam Szafran, obsession d'un peintre" à l'Orangerie :
https://ballades-page3873.blogspot.com/2022/12/rosa-bonheur.html

l'exposition "Oskar Kokoska, un Fauve à Vienne" :
https://ballades-page3873.blogspot.com/2023/04/oskar-kokoschkaun-fauve-vienne.html

et l'exposition "Exposition Füssli, entre rêve et fantastique" :
https://ballades-page3873.blogspot.com/2023/04/exposition-fussli-entre-reve-et.html

Nous voyons le 12 novembre 2022 au Centre Pompidou-Beaubourg, la vaste rétrospective consacrée à l'oeuvre de Gérard Garouste, né en 1946, qui est une quête
métaphysique.
Mon texte se base sur les commentaires généreux de l'exposition.
Portrait de Gérard Garoute au palais de l'Elysée en 1983, dans la chambre de Danielle Mitterrand où vient d'être installée sa fresque "la Cinquième Saison"_Photo Michel Maiofiss

Gérard Garouste, peintre contemporain, est connu pour ses tableaux exubérants "qui jouent avec la mythologie, les religions, les contes et l’inconscient"

Avec 120 tableaux, la plupart de grands formats, c'est une rétrospective de cet artiste aux influences grecques, bibliques et hébraïques.

Nous allons découvrir son parcours sous le signe de l'étude, de la recherche permanente, et de la folie.

L'exposition s'est tenue du 07 septembre 2022 au 02 janvier 2023.

Gérard Garouste fait ses études aux Beaux-Arts de Paris de 1965 à 1972, dans l'atelier du peintre abstrait Gustave Singier. Il découvre Marcel Duchamp et l'art conceptuel, mais ne s'y intéresse pas.

C'est la démarche de Dubuffet qui lui inspire la série de dessins monumentaux qu'il présente à la galerie Zunini à Paris en 1969. Il ne subsiste que de petits formats de ces dessins.
Odalisque_1970_mine de plomb et pastel gras sur panneau_Collection particulière

Dès 1965, Garouste pratique le dessin d'humour et attiré par le théâtre, il a co-fondé La Compagnie du Pallium avec son ami Jean-Michel Ribes, auteur et metteur en scène.

Il réalise des décors et costumes pour des pièces créées par Jean-Michel Ribes, il joue même ponctuellement dans des pièces.

C'est une exposition de Jean Dubuffet et des œuvres d'art brut qui l'orientent vers la peinture figurative à la fin des années 1970.

Dans les années 1970, à la suite d'un rêve, il invente deux caractères complémentaires et antagonistes qui occuperont toute son oeuvre future, "Le Classique et l'Indien" ou l'Apollinien et le Dionysiaque, présents en nous.
Le Classique est affublé d'un bonnet (d'âne ? d'une mitre ?) que l'artiste associe à l'Indien. Il marche seul avec son bâton et sa besace dans un paysage d'hiver, comme un juif errant.
"Le Classique", année 1970_Huile sur papier marouflé sur toile_collection particulière

En 1977, il crée au théâtre Le Palace sa propre pièce expérimentale, "Le Classique et l'Indien". Il tient le rôle du Classique. Le rôle de l'Indien est tenu par David Rochline, frère d'Elisabeth, son épouse. Le rôle du chien qui évoque le subconscient est tenu par son épouse. 
Pour ce spectacle, il est auteur, metteur en scène, acteur et décorateur.
Il intervient au Palace jusqu'en 1982, comme scénographe et comme peintre.
Photographies prises lors de la représentation de la pièce de G Garouste, Le Classique et l'Indien_1977_Photo Michel Maiofiss

Parallèlement à son activité de décorateur du Palace, Garouste reprend la peinture. En 1979, s'ouvre l'exposition "Comédie policière" à la galerie Travers à Paris. Elle inaugure un cycle de deux ans. 
"Comédie Policière" propose une énigme à travers une dizaine de tableaux mettant en scène, un homme, deux femmes, un enfant et trois accessoires : un bâton de rouge à lèvres, un bouchon de champagne, un cavalier de jeu d'échecs.
Comédie policière_Bouchon de champagne_1978_huile sur toile_collection particulière

Comédie policière_Rouge à lèvres_1978_huile sur toile_collection particulière

Comédie policière_Cavalier_1978_huile sur toile_collection particulière

Comédie policière_Rouge à lèvres et Bouchon de champagne_1978_huile sur toile_collection particulière

 Au début des années 1980, il se lance dans la réalisation de grands tableaux sous le signe de la mythologie grecque, à laquelle il superpose sa mythologie personnelle autour des figures du "Classique et de l’Indien" – l’Apollinien et le Dionysiaque. 
Le fondement de sa peinture se trouve dans cette dualité.

En 1980, il expose pour la première fois à la galerie Durand-Dessert, avec une peinture figurative, mythologique et allégorique.

C'est en 1982, à New York dans le cadre d'une exposition de la promotion de la France, qu'a lieu sa première exposition internationale à la Holly Solomon Gallery.

Son tableau Adhara est choisi par le critique Otto Hahn pour être exposé à la Galerie Holly Solomon.

C'est le début de sa reconnaissance artistique et le succès de l'oeuvre incite le marchand américain Leo Castelli à prendre Garouste dans sa galerie.
Il l'exposera dès l'année suivante puis en 1985 et en 1987.
Adhara_1981_huile sur toile_collection Liliane et Michel Durand-Dessert

Ce premier dessin monumental inaugure une série d'oeuvres qui se poursuivra jusqu'en 1984 sur papier de grand format à la mine de plomb ou à la sanguine.

Orthros est dans la mythologie grecque le chien bicéphale dont la liaison incestueuse a engendré le Sphynx.
Garouste y rajoute le personnage du Classique et un chien qui chez Garouste est le guide des âmes des morts.
Orthros et le Classique_1981-1982_Fusain sur papier_Musée National d'Art Moderne, centre Pompidou, Paris

De tous les grands tableaux, Orion le Classique, Orion l'Indien est l'un des plus emblématiques. Il met en scène la figure du beau chasseur aveuglé de la mythologie grecque, qu'il superpose à celles du Classique et de l'Indien de la mythologie personnelle de Garouste.
Le Classique est la représentation de la connaissance et l'Indien celle de l'excès.
Orion le Classique, Orion l'Indien_1981_huile sur toile_Musée National d'Art Moderne, centre Pompidou, Paris

Le Déjeuner sur l'herbe_1982_Mine de plomb sur papier_collection particulière

Parmi les très grands tableaux de Garouste des années 1980, on y trouve outre la mythologie, l'astronomie.
Colombe est une petite constellation située au sud de celle du grand Chien. L'énigme est constituée par l'étrange motif torsadé au sol qui semble sortir du tapis.
Colomba_1981_huile sur toile_Courtesy Galerie Templon, Paris, Bruxelles, New-York

Trois personnages fomentent un complot destructeur. La torsion des membres et le tournoiement qui donne le mouvement au tableau ont poussé les critiques à qualifier Garouste de maniéristes dans le sillon de Le Gréco ou le Tintoret
Les incendiaires_1982_Huile sur toile_Museu Cocoa Berardo

Dans une arène, deux colosses luttent encadrés de deux colonnes où sont adossés des personnages.
Qui lutte ? le Classique et l'Indien ? Qui gît au sol ?
L'objectif de Garouste n'est pas de donner les clefs d'interprétation mais de nous faire prendre conscience de notre propre interprétation.
Les lutteurs_1982_huile sur toile_collection particulière

Dans cette toile mettant en scène un homme et une femme dans un intérieur dont les rôles traditionnels sont inversés. Garouste invite à bousculer les codes et les certitudes.
La Chambre Rouge_1982_huile sur toile_Lidwig Museum Koblenz

L'Indien, le Chien et le Miroir_1982_huile sur toile_Collection particulière

La Vénus et le Pendu_1984_sanguine sur papier monté sur châssis_collection de l'artiste

Cette oeuvre commandée par le Comité d'art sacré dans le cadre du 4e centenaire de la mort de la sainte a représenté un vrai défi pour Garouste. Comment représenter l'extase d'une sainte à mi-chemin entre douleur et jouissance ?
Sainte Thérèse d'Avila_1983_Huile sur toile_Artothèque Nouvelle Aquitaine

Garouste puise aussi son imagination dans la littérature. La "Divine Comédie" de Dante, donne naissance, après le milieu des années 1980, à une série de tableaux
aux motifs en délitement et aux couleurs grinçantes.

La Divine Comédie l'initiera aux différents niveaux de la lecture biblique. Cette initiation l'amènera à l’étude du Talmud et du Midrach,
Ce tableau quasi abstrait évoque la traversée du Styx,
Phlégyas, Dante et Virgile_1986_Huile sur toile_Musée National d'Art Moderne, Centre Pompidou, Paris

L'oeuvre de Dante inspire à Garouste des formes indistinctes d'où émergent par moments des personnages plus ou moins nets. Avec la "Divine Comédie, il développe une peinture de l'imprécision.
Manto_1986_huile sur toile_Collection Bernard Massini

Inferno, Dante et Virgile_1986-1987_Huile sur toile_Collection particulière Paris

Les rives de l'Eunoé_1986_Huile sur toile_FRAC, Nouvelle Aquitaine Méca, Bordeaux

La descente aux enfers de Dante se fait depuis la forêt obscure par une longue route qui traverse les neuf cercles concentriques de l'enfer. 
Chaque palier, correspond à l'expiation de péchés où se purgent les péchés au fond de la fange, de pluie, de vent, de fleuves de sang, de terre brûlante....
Cerbère est le gardien du troisième cercle, celui des gourmands, mordus et griffés par le monstre.
Dante et le Cerbère_1986_Huile sur toile_Collection Liliane et Michel Durand-Dessert

Sans titre_1986-1987_Huile sur toile_Collection Patrick Fourtin

Peindre l'Enfer pour Garouste, c'est peindre les éléments déchaînés de la nature.
Sans titre_1986-1987_Huile sur toile_Musée d'art Moderne et contemporain de Strasbourg

Sans titre_1986-1987_Huile sur toile_Collection Stéphane Magnan

A l'occasion d'une exposition collective aux Musée des Beaux Arts de Reims en 1987, Garouste découvre d'immenses tentures en toile de lin des 15e et 16e siècle, succédanées de tapisserie qui servaient de décors provisoires lors de cérémonies. 

Ces Indiennes deviennent des sujets de recherche de Garouste. La Divine Comédie continue à être son thème de prédilection sur ces toiles écrues et peintes à l'acrylique. 

L'indienne au sous-titre "Les Suppliciés" inaugure la série, qui comporte plusieurs variations autour du thème biblique de la chute des anges.
Indienne, La chute des anges 1_1988_acrylique sur toile_collection particulière, France

Indienne, La chute des anges 2_1988_acrylique sur toile_collection particulière, France

Indienne, La chute des anges 3_1988_acrylique sur toile_collection particulière, France

Indienne,_1988_acrylique sur toile_collection particulière, France

Indienne_1988_acrylique sur toile_collection particulière, France

Indienne_1988_acrylique sur toile_collection particulière, France

Indienne_1988_acrylique sur toile_collection particulière, France

Indienne_1988_acrylique sur toile_collection particulière, France

Indienne_1988_acrylique sur toile_collection particulière, France

Indienne_1988_acrylique sur toile_collection particulière, France

A partir des années 1990, Garouste s'intéresse à la religion juive à travers l'étude du Talmud et du Midrach. Il apprend l'hébreu et se converti au judaïsme en 2014.

A partir de ce moment, toutes ses peintures vont être inspirées par le Talmud.

La Haggadah ou récit est un texte rédigé en hébreu ancien, remontant à près de deux millénaires. Il comporte des histoires sous forme de contes, légendes, paraboles ou fables, propres à rendre plus accessibles les messages sacrés de la tradition juive. Il est utilisé en particulier lors de la cérémonie de la Pâque juive. Garouste a illustré deux Haggadot, dans deux éditions différentes. Celle-ci est présentée avec un ensemble de gouache qui ont servi à sa réalisation.
Haggadah_2001_220 pages_ouvrage tiré sur papier chiffon, illustré de 50 gouaches et encres originales_éditions Assouline, Paris_Courtesy Galerie Templon, Paris, Bruxelles, New York

Œuvres préparatoires pour le livre Haggadah, 2000-2001_ 10 gouaches sur papier_collection particulière

Deux carnets de Gérard Garouste

Garouste a illustré la Meguila ou "Rouleau d'Esther". Il s'agit d'un texte biblique en hébreu lu à l'occasion de la fête juive du Pourim. Il évoque l'intercession de la reine Esther afin de déjouer les plans du grand vizir Haman qui projetait l'extermination des juifs dans l'empire perse.
Rouleau d'Esther_2015_Gérard Garouste, Armand Benhamron, Elisabeth Garouste_lithographie numérique pigmentaire, gouache, feuille d'or_étui en carton enroulé_Musée d'art et d'histoire du judaïsme, Paris_Don de la fondation Excelvy

Garouste explore au travers de sa peinture, l'intertextualité des textes hébraïques.
L'Eve à la fontaine_1995-1996_huile sur toile_Collection particulière

Les thèmes récurrents de cette série sont Adam, la mort, la résurrection, le châtiment, le feu et l'eau. Il est dans un espace temps indéfinissable et ouvert à tous les possibles où la rigueur et la logique ne sont pas de mise.
Le chien au baptême_1995-1996_ huile sur toile_collection particulière, France

L'Adam purifié_1995-1996_Huile sur toile_Collection Philippe Starck

Garouste approfondit dans les années 1990 sa connaissance de la Bible Hébraïque. A cette période, un ensemble de tableau marque le dialogue entre image et mot. 
Les personnages ressemblent souvent à des lettres, leurs bras et leurs jambes sont démesurés, tordus.
L'Adam et les trois lumières_1995-1996_Huile sur toile_Collection particulière, France

Le titre donné par Garouste à cette oeuvre est la traduction de "Yakhin", qui désigne l'une des deux colonnes d'airain dressées à l'entre du temple de Jérusalem par le roi Salomon.
Il établira_1995-1996_huile sur toile_Fonds François Fauchon pour l'art contemporain (Fffac)

Entre chien et loup_1995-1996_huile sur toile_Collection particulière, France

Garouste redécouvre le Don Quichotte de Cervantès à la lumière d'une thèse selon laquelle il aurait pu être un marrane. Cela a suscité une nouvelle thématique dans l'oeuvre du peintre inauguré par un livre de 699 pages illustré de 150 gouaches.
Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche_1998_688 pages, deux volumes brochés sous coffret, relié pleine toile, illustré de 150 gouaches et 126 lettrines ornées Bibliothèque Kandinsky, Centre Pompidou, Paris




Don Quichotte_2013_Bronze_Collection particulière Paris

Les livres brûlés est un thème récurent dans la peinture de Garouste. 
Dans l'oeuvre de Cervantès, Don Quichotte est victime de destruction criminelle par le feu d'une partie de sa bibliothèque. Ce tableau renvoie également au rabbin Nahman de Bratslav (fin 18e siècle) qui a fait brûler intentionnellement sa bibliothèque.
Don Quichotte et les livres brûlés_2013_huile sur toile_collection particulière

Dans cette scène, les personnages du livre forment un défilé tragi-comique dans lequel Garouste s'est représenté en bouffon aux côtés de l'ange qui confie des secrets à l'âne.
Le théâtre de Don Quichotte_2012_huile sur toile_Collection Hervé Lancelin, Luxembourg

Le vol du grison_1998_Huile sur toile_Courtesy Galerie Templon, Paris, Bruxelles, New York

La Duègne et le Pénitent_1998_huile sur toile_The Art Collection from the Européan Central Bank

Adam renvoie à la question des origines que vient renforcer l'imbrication entre un homme nu et un arbre. Les pieds de l'homme sont les racines de l'arbre. L'arbre est aussi récurrent dans la Kabbale.
Adam Don Quichotte_1998_Huile sur toile_Collection Particulière

Garouste continue à puiser son inspiration dans Don Quichotte
Le Masque_1998_Huile sur Toile_Collection Particulière

Le titre de ce tableau renvoie à l'épisode biblique de Judas et Tamar à Kézive qui veut dire "mensonge". 
Dans cette ville, la jeune Tamar, voulant une descendance suite à la mort de ses deux époux, se déguise en prostituée pour séduire son beau-père. Le stratagème de Tamar lui est dicté par l'intuition de la nécessité d'une descendance à Judas. Elle donne ainsi  naissance à deux jumeaux dont l'un d'eux est l'ancêtre du roi David, la lignée messianique.
La Ville Mensonge-1999-2000_Huile sur toile_Collection Victor Médard de Chardon

La jeune femme pourrait être Tamar, personnage biblique. Elle tient un petit instrument chirurgical qui est utilisé pour la circoncision.
L'Alliance-1999-2000_Huile sur Toile_Collection Particulière

Le vieillard et la Prostituée_1999-2000_Huile sur Toile_Collection particulière

Garouste a réalisé plusieurs autoportraits. Il se représente ici dans un paysage, portant sous le bras un masque de chien. 
Le chien guidé par son flair renvoie à l'intuition. Les pieds de l'artiste orientés vers l'arrière, soulignent le refus de l'artiste d'une direction unique et invitent à l'errance.
Le masque de chien_2002_Huile sur toile_FNAC, Centre National des Arts Plastiques

Garouste commence en 2002 une série de portraits de proches et de personnalités du monde de l'art. 
Il part d'une photo du modèle auquel il fait subir des déformations grâce à un logiciel informatique, puis il fait poser le sujet en cherchant à lui faire prendre la posture suggérée, et le photographie à nouveau. 
La peinture issue de ces photos parachève la distorsion et le démembrement des corps, laissant le visage intact et reconnaissable. 
Elisabeth, son épouse et ses deux fils, Guillaume et Olivier se sont prêtés au jeu, ainsi que leurs belles-filles, Stéphanie et Noémie.
Portrait d'elisabeth_2005_Huile sur toile_Collection Particulière

Le Mat et le Fou (portrait d'Olivier)_2003-2004_Huile sur toile_Collection Particulière

La Mouche (portrait de Guillaume)_2003-2004_Huile sur toile_Collection Particulière

Sans titre (Portrait de Stéphanie)_2003 Huile sur toile_Collection Particulière

En 2005, Garouste réalise une série d'oeuvres sur le thème de "L'Ânesse et la Figue". Il remarque qu'en hébreu, il existe une proximité entre les mots "ânesse" et "figue" et qu'ils sont mis en relation dans le Talmud.
L'ânesse et la figue_2005_Huile sur toile_Collection Particulière, Paris

Selon Garouste, ce tableau peut être lu comme une approche approximative de l'épisode biblique de la fuite en Egypte.
Ave Eva_2005_Huile sur toile_Courtesy Galerie Templon, Paris, Bruxelles, New York

Ce tableau met en évidence les propos méprisants de saint Augustin concernant le rapport des Juifs aux écritures saintes. Les Juifs seraient dépositaires des livres (Ancien testament) qui porte en germe la venue du Messie, mais ils n'auraient pas été capables de le comprendre. Ils sont comme des libraires aveugles qui diffusent des livres mais ne savent pas lire.
Les Libraires aveugles_2005_Huile sur toile_FNAC, Centre national des Arts Plastiques

L'artiste reprend l'idée du double dans un autoportrait, inspiré d'une gravure de Goya. L'âne incarne la sagesse, mais chercher à l'atteindre à travers l'étude est aussi un poids, comme le suggère le fardeau que semble représenter l'âne pour l'étudiant qui lit.
L'Etudiant et l'Autre lui-même_2007_Huile sur toile_Collection Particulière, Paris

Ce titre est la traduction du nom de l'Hévéen Sichem ben Hamor, celui qui avait séduit Dina selon la Genèse. Il s'agit d'un autoportrait en âne, où Garouste semble empêché avec ses deux moignons en guise de bras. Il nous met en garde contre le piège de la traduction littérale, qui peut conduire à des aberrations.
Epaule fils d'Âne (autoportrait)_2005_Huile sur toile_Courtesy Galerie Templon, Paris, Bruxelles, New York

Pinocchio est un personnage récurrent chez Garouste, symbole de la la remise en question de la vérité. 
La quête de la vérité est vaine et la peinture est un mensonge.
Pinocchio et la partie de dés_2017_Huile sur toile_Collection Particulière

La Marionnette à la robe rouge_2015_Huile sur toile_Collection Particulière

Ce tableau met en scène une ânesse affublée du costume des suppliciés de l'inquisition et l'artiste en posture contorsionnée qui suggère le malaise et l'indignation. 
Trois livres sont stigmatisés : la Septante, le psaume 56 de saint Augustin et Mein Kampf d'Hitler. 
L'artiste dénonce les dangers du dogme en montrant qu'un fil relie les approximations et contresens volontaires issus de la traduction de la bible hébraïque en grec et en latin, aux exactions qui ont conduit au génocide des Juifs lors de la 2e guerre mondiale. La question de l'interprétation des textes est affirmée avec force.
Passage_2005_Huil sur toile_Collection particulière

En proposant sa relecture du retable d'Issenheim, Garouste rappelle la vigilance à avoir dans l'interprétation des textes et de l'iconographie. 
L'artiste met au premier plan le livre des prophètes, ouvert mais illisible tandis que celui de la Vierge déchiffrable est censé en être la traduction. Cependant le retour au texte hébraïque prouve que cette traduction est erronée. 
L'artiste s'est représenté en camisole, à terre pris de délire pour signifier le choc de cette duperie.
Isaïe d'ssenheim_2007_Diptyque_Huile sur toile_Collection Marc et martine Jardinier

L'instabilité psychique de Garouste a marqué les années 1970 et le début des années 1980. Après une longue période d'accalmie, une nouvelle crise survient en 1991. Ce tableau y fait directement référence. L'artiste raconte sa route vers Chartres, où dictée par une pulsions incontrôlable il va dans la cathédrale et interrompt un mariage, casse des cierges, sème le désordre et se retrouve interné.
Chartres_2007_Huile sur toile_Collection particulière, Paris

Parmi ses souvenirs d'enfance en bourgogne, l'artiste se rappelle de la cuisine à la fois chaleureuse et inquiétante, où le lit de sa tante était toujours en portefeuille.
Le lit en portefeuille_2011_Huile sur toile_Collection particulière

Cette peinture évoque les nombreuses et violentes disputes avec son père. Au sol le sous-main renvoie aux biens que le père de l'artiste avait spolié aux Juifs pendant la guerre.
Caved_2007_Huile sur toile_Collection Magnus Konow

Dès son premier internement à Villejuif, Garouste se souvient d'un malade accroupi sur un meuble et jouant de la flûte avec une règle.
Le Joueur de flûte_2007_Huile sur toile_collection particulière

A la fin des années 2000, L'artiste s'approprie le thème du "Faust" de Goethe, dont la légende et les personnages variés (Faust, Méphistophélès, Marguerite, Wagner, les sorcières...) sont des sujets pour cette série qu'il appelle "Songe d'une nuit de Walpurgis". La guitare brisée se réfère à une scène de la pièce de théâtre.
La guitare Brisée_2009_Huile sur toile_Collection particulière

Le Golem, être artificiel fait d'argile dans la mythologie juive ne doit pas son existence au souffle divin, contrairement à Adam. La scène est inspirée d'un passage du "Journal" de Franz Kafka.
Le golem_201_Huile sur toile_Collection Particulière, France

Le "Pacte" est celui conclu entre Faust, incarné par Garouste et Méphistophélès sous les traits de son ami Jean-Michel Ribes avec qui il s'opposait souvent sur des questions métaphysiques.
Le Pacte_2011_Huile sur toile_Collection Particulière

L'apprenti alchimiste Wagner montre avec fierté sa créature, l'Homuculus à Méphistophélès qui se moque de lui. La quête de la connaissance n'est-elle pas vouée à l'échec ? Telle est la tourmente qui ravage Faust.
Wagner, Méphistophélès et l'Homonculus_2013_Huile sur toile_collection particulière

Le triptyque "Le Banquet", oeuvre de Franz Kafka, renvoie à de nombreuses clés de lecture :
- la fête de Pourim avec ses confettis, qui célèbre le festin d'Esther,
- le glissement du mot confetti soit "coriandolo" en italien, qu'on peut rapprocher des grains de coriandre de la manne céleste
- le tableau "la récolte de la manne" du Tintoret
Le banquet_2021_triptyque_ de droite à gauche, Pourim, Festin d'Esther, le Don de la manne_Huile sur toile_Collection de l'artiste


 Extraordinaire et magnifique exposition placée sous le signe de l'étude et de la folie, elle suit le parcours du cheminement personnel de l'artiste.

Sa peinture est dérangeante, inclassable, déroutante... géniale, grandiose !

Gérard Garouste occupe une place à part dans l’histoire de la peinture.
Portrait de Gérard Garouste dans son atelier de Marcilly sur Eure en février 2022_Phot Centre Pompidou; MNAM-CCI_Hélène Mauri







































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